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Jean-François CARLOT, Docteur en Droit, Avocat Honoraire
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II/VII

SUPPORT DE COURS DE DROIT DES ASSURANCES


LA PLACE DE L'ASSURANCE DANS LA GESTION DES RISQUES - I/VII

Notion - Historique - Intérêts - Mécanisme

Dernière mise à jour : 1er Novembre 2019




TITRE I

LA PLACE DE L'ASSURANCE DANS LA GESTION DES RISQUES


INTRODUCTION

L'assurance est une technique financière par laquelle un "assureur" organise en mutualité une multitude d'"assurés" esposés à la réalisation de risques déterminés, et indemnise ceux d'entre eux qui subissent un sinistre grâce à la masse commune des primes collectées.

Elle repose sur des règles mathématiques statistiques et de probabilités en ce qui concerne la fréquence et le coût moyen de ces sinistres déterminés, permettant de pallier les conséquences économiques d'un dommage matériel, financier ou corporel subi par l'assuré.

Elle est donc utile tant à la protection des biens et des personnes du particulier qu'à la prise de risque liée à la nécessité d'entreprendre pour l'entreprise. Elle accompagne donc le développement économique.

A la différence du Banquier, qui fait commerce de l'argent, l'assureur ne s'engage pas toujours à faire fructifier et à restituer les fonds confiés par chacun de ses clients, mais à indemniser ceux dont le patrimoine ou la personne aura été altéré par un évènement prévu au contrat.

Le mécanisme et les avantages fiscaux de l'assurance "Vie" peut être un instrument de gestion patrimoniale pour le particulier, notamment en matière de retraite ou successorale, et permettre également le remplacement de l'homme clé, ou le rachat de parts d'associés.

L'assurance relative aux biens est un contrat d'indemnité ; l'indemnité due par l'assureur à l'assuré ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre (Article L 121-1 Code Ass.).

Dans l'assurance de dommage le versement d'une prime, même supérieure au préjudice éventuellement subi, ne peut obliger l'assureur qu'à régler une indemnité proportionnelle à celui-ci, le (principe indemnitaire, d'ordre public, s'opposant à ce que l'assuré puisse bénéficier d'un quelconque enrichissement du fait du sinistre.

En revanche, en matière d'assurance sur la vie et d'assurance contre les accidents atteignant les personnes, les sommes assurées sont fixées par le contrat (Art. L131-1 C.Ass.). L'assureur peut donc être amené à régler des indemnités "forfaitaires", en contrepartie du versement d'une prime : assurance-vie, retraite, maladie, invalidité, perte d'emploi.

Dans ce cas, il ne peut être subrogé aux droits du contractant ou du bénéficiaire contre des tiers à raison du sinistre. (Art. L 131-2, Al.1, C.Ass.)

Mais, le contrat peut mettre à sa charge des prestations "indemnitaires"(Art. L 131-2, al.2, C.Ass.)

De plus, l'obligation de l'assureur ne consiste pas seulement à verser une indemnisation forfaitaire ou indemitaire, mais tend de plus en plus à une réparation "en nature" au moyen de prestations d'assistance : rapatriement, protection juridique, dépendance...

L'assurance repose donc toujours sur un contrat passé entre l'assuré et l'assureur, précisant les obligations respectives des parties.Toutefois, ce type de contrat est étroitement réglementé par des principes d'ordre public, et la loi peut imposer des clauses-type, notamment dans les risques où l'assurance est obligatoire : circulation, construction...

Dans tous les cas, l'opération d'assurance repose obligatoirement sur l'existence d'un aléa, principe d'ordre public selon lequel seules Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police. (Article L 113--1 du Code des Assurances)

En effet, selon l'article 1108, al.2, du Code Civil, le contrat d'assurance a un caractère aléatoire , dans la mesure où les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d'un événement incertain.

L'aléa constitue donc l'"essence" du contrat et s'oppose à ce que l'assurance soit applicable à un risque que l'on sait déjà réalisé au moment de la souscription, ou à un dommage intentionnellement causé par l'assuré.

L'assurance est donc une opération complexe, qui repose sur des méthodes actuarielles reposant sur des bases mathématiques et statistiques, ainsi que le calcul de probabilités issues de données massives.

Le contrat devra donc porter, notamment sur la détermination et les contours du risque assuré, les conditions et les limitations d'application de la garantie, le montant de la prime, et l'étendue des obligations de l'assureur en cas de sinistre, complexité qui va nécessiter une information et une protection particulière du consentement des cocontractants profanes en la matière, et notamment du consommateur.

De plus, l'existence du contrat d'assurance va "intéresser" certains tiers qui pourront bénéficier de l'indemnité due par l'assureur, tels que les créanciers de l'assuré ou les victimes de ce dernier.

En effet, dans la mesure où, selon l'article 2285 Code Civil, les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers l'assurance devient ainsi non seulement une garantie de solvabilité de l'assuré dont elle renforce le crédit, mais un instrument privilégié de l'indemnisation des victimes, notamment grâce aux garanties de responsabilité civile.

En permettant la prise en charge de remboursement d'emprunt grâce à des garanties de personne,l'assurance va augmenter le crédit de l'assuré, notamment en lui permettant de bénéficier de prêts bancaires (Assurance emprunteur).

L'opération d'assurance a donc donné naissance à un Droit spécifique : le Droit des Assurances, qui repose sur les mécanismes combinés du Droit des obligations et des Contrats, du Droit de la Consommation et de principes d'ordre public, et dont les pincipes sont codifiées dans le "Code des Assurances".

L'assurance concerne tous les domaines de la vie économique et sociale : Protection des patrimoines ou personnes des particuliers des entreprises ou des collectivités, et s'applique à la plupart des risques : automobile, incendie, vol, responsabilité, catastrophes naturelles ou technologiques, terrorisme, mais aussi Vie, invalidité, décès, chômage,retraite, prévoyance, et également assistance ou protection juridique...

Elle s'applique également à des domaines de risques spécifiques tels que construction, maritimes, aériens, marchandises transportées, spatiaux...

Enfin, elle permet à l'entreprise de garantir sa pérennité et sa solvabilité grâce aux assurances de dommages : Bris de machine, pertes d'exploitation, responsabilité civile exploitation et après livraison, faute inexcusable de l'employeur, transports, mais aussi grâce aux assurances de personnes : régimes de prévoyance complémentaire, garanties homme-clé...

Sont également proposées des assurances contre des risques émergents liés à l'informatique et à la circulation des informations sur Internet : cyber-risques, piratage, e-reputation...

Système d'indemnisation d'intérêt collectif, l'assurance a été rendue obligatoire dans un grand nombre de domaines de risques : habitation (MRH), automobile, emprunteurs, et pour certaines professions réglementées : avocats, médecins, immobilier, voyagistes, recherches bio-médicales...

CHAPITRE I

LA NOTION D'ASSURANCE



L'assurance s'est développée de manière pragmatique, sous les contraintes économiques et sociales liées à la nécessité d'entreprendre.

Elle repose sur l'idée de mutualisation des risques et de solidarité pour faire face aux aléas de toute nature.

Elle s'inscrit dans une démarche commune d'épargne et de prévoyance pour financer la réparation de tout ou partie des dommages causés à ceux des membres de la mutualité frappés par le sort.

I - EVOLUTION HISTORIQUE

A - LA PRE-ASSURANCE

L'idée de mutualité et de prévoyance appartient aux valeurs des sociétés traditionnelles reposant sur la solidarité familiale ou corporatiste.

On retrouve des "traces" de la pré-assurance dans la plus haute antiquité :

  • Caisse d'entraide des tailleurs de pierres de la Basse-Egypte

  • 2.250 ans avant J.C., dans le Code d'Hamourabi, en ce qui concerne les transports par caravane (Darmatha)

  • Le législateur athénien Solon (640-558 avant J.C.) obtint des Hétairies (groupements et artisans) leur intervention en faveur de leurs membres frappés par l'adversité.

  • Théophraste (371-286 av. J.C.) fait état d'une caisse commune alimentée par des cotisations, et dont le contenu servait à prodiguer des secours.

  • A l'époque romaine, le Collège funéraire de Lanuvium assurait à ses membres, moyennant droit d'entrée et cotisations, un bucher et un tombeau, tandis que les légionnaires cotisaient pour permettre à leur membres de faire face à des frais de mutation, de retraite, ou de décès...

B - NECESSITES DU COMMERCE MARITIME

1 - Mutualisation des risques maritimes

Les Phéniciens mirent en oeuvre le principe de la "mutualisation" en mettant "en gage" une certaine quantité de marchandises pour indemniser les armateurs et les marchands des pertes causées par les naufrages.

Les Romains ont adopté le principe de "solidarité" dans le "nauticum foenus" (digeste de Justinien).

Les Romains et les Athéniens connaissaient le mécanisme qui a donné lieu au "prêt à la grosse aventure", et selon lequel le prêteur de deniers touchait un intérêt de 15 à 40 % si la cargaison arrivait à bon port.

Mais cette pratique fut interdite, comme usuraire, par Grégoire IX en 1227.

C'est pourquoi, de riches commerçants s'engagèrent à "garantir" une cargaison moyennant le paiement préalable d'une somme d'argent.

C'est dans le domaine des risques maritimes qu'est donc apparue la notion d'assurance moderne, comme l'attestent les lois Rhodiennes du VIIIe siècle, le statut de Marseille de 1256, ou les Statuts Maritimes de Venise de 1255.

Un des plus anciens contrats a été conclu à Gènes en 1347 et était destiné à garantir le navire Clara pour un transport de marchandises jusqu'à Majorque.

Les premières entreprises d'assurance maritime sont apparues à partir de 1424 à Gènes, puis en Angleterre avec des "Clubs" de particuliers.

2 - En FRANCE

L'assurance maritime a été pratiquée à Rouen par des assureurs espagnols, comme en font foi les actes de Tabellionnage des années 1525 à 1530 qui reprennent des pratiques espagnoles de Séville ou de Bilbao, selon deux types de transports :

Un contrat français a été conclu en Octobre 1584 pour un transport de marchandises entre Marseille et Tripoli.

Les statuts de Marseille s'inspirent de dispositions maritimes florentines.

La nécessité d'une réglementation accompagne très tôt ces premières conventions :

L'assurance moderne s'est donc développée d'abord pour en raison des nécessités du Commerce, avant de s'étendre à la protection des patrimoines des particuliers.

Son évolution est directement liée à celle de la Société, au développement de l'activité économique, à la nécessité d'entreprendre et aux échanges internationaux liés à la vie des affaires.

La réassurance moderne est apparue en Allemagne vers la fin du XIXe siècle, les sociétés d’assurance allemandes ayant besoin de couvrir des risques industriels de plus en plus importants. Des techniques de réassurance se sont développée et, dès 1846, la "Kölnische Rück " a été créée en Allemagne pour satisfaire aux besoins de capacité.

C - TRANSFORMATIONS ECONOMIQUES ET SOCIALES

Le XIXe siècle voit une transformation importante des structures sociales due à l'expansion économique.

Le développement de l'industrie, le regroupement des terres agricoles et leur concentration entre les mains de gros propriétaires fonciers a favorisé l'exode rural, ainsi que l'amélioration des moyens de communication, notamment ferroviaires.

1 - CONCENTRATION DES PATRIMOINES

L'obligation pour les propriétaires fonciers de faire exploiter leurs terres ou de donner leurs immeubles en location les a exposés au risque de la ruine, du fait de locataires insolvables.

De même, en a-t-il été du risque des entreprises en plein essor, exposées à la perte de leurs bâtiments, outils de production, stock et marchandises du fait d'un aléa, mais aussi à une dette de responsabilité à l'égard de leurs salariés ou de tiers.

Le 31 mars 1686 a été créée en France la "Compagnie Générale pour les Assurances et Grosse aventure de France", en 1754 est créée la Chambre Générale des Assurances, puis apparaissent d'autres Compagnies comme la “Société d’Assurances Générales contre l’incendie” des frères Périer (1786) et la “Compagnie d’assurances contre l’incendie” de Clavière et Batz, le Phénix, "l' Union", "le Soleil Incendie", "Sécurité Générale"..., qui se sont aujourd'hui regroupées.

2 - ELARGISSEMENT DU DOMAINE DE LA RESPONSABILITE CIVILE

L'élargissement constant du domaine de la responsabilité civile, ainsi que la constitution de patrimoines de plus en plus dispersés servant de gages aux créanciers, ont nécessité leur protection contre le risque de disparition, soit du fait d'une perte matérielle, soit du fait d'une dette.

La loi du 9 Avril 1898 sur la réparation des accidents du Travail a conduit les entrepreneurs à assurer massivement leur responsabilité à l'égard de leurs ouvriers, jusqu'à la loi du 30 Octobre 1946 sur la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

II - NAISSANCE DE L'ASSURANCE

A - ASSURANCE TERRESTRE

1 - En ANGLETERRE

C'est à la fin du XVIIe siècle qu'apparaît l'assurance incendie, compte tenu de l'accroissement de la population et le développement des agglomérations, qui étaient composées de bâtiments en bois extrêmement rapprochés et vulnérables au feu.

Le 2 Septembre 1666, en pleine nuit, un incendie s'est déclaré dans une boulangerie de Londres et s'est étendu avec une telle ampleur qu'il faudra quatre jours pour le maîtriser.

Il détruira les 13.000 maisons de 60.000 des 70.000 habitants de la ville, sur plus de 400 rues et 175 hectares.

La légende prétend qu'une des rares maisons épargnées était une taverne exploitée par un certain Edward Lloyd, à Tower Street, qui eu l'idée de créer un office d'assurance couvrant les risques les plus variés, et qui deviendra avec le temps la plus grande organisation mondiale d'assurance : la Lloyd's de Londres.

Il s'agit d'une "bourse", créée par le "Lloyd's Act de 1871", composée de personnes physiques "names" ou morales.

En réalité, si les spécialistes s'accordent pour convenir que si cette institution est bien née dans une taverne, c'est en 1662, soit 4 ans avant le grand incendie de Londres, qu'un certain Edward Lloyd a voulu assurer les fruits et les revenus de la pêche...

2 - En FRANCE

En France, il faudra attendre l'année 1717 pour voir se créer à Paris le "Bureau des Incendiés", organisme municipal qui présente d'avantage le visage d'une caisse de secours que d'un organisme d'assurance.

De nombreuses municipalités ont suivi cet exemple.

Aux XVIIIe siècle, des caisses diocésaines sont fondées dans des grandes villes dans un but d'entraide et de bienfaisance, et trouvent leurs ressources dans des quêtes bi annuelles.

La Révolution les transformera en Caisses départementales, telles que la "Caisse départementale des Incendiés des Ardennes"....

B - ASSURANCE-VIE

C'est encore dans le domaine maritime que l'assurance-Vie se développa puisqu'il devint l'usage d'assurer les cargaisons d'esclaves comme marchandises à transporter, puis le capitaine et l'équipage, et enfin, au XVIe siècle, des Compagnie d'Anvers l'appliquèrent aux passagers.

En revanche, l'assurance sur la vie a eu, en France, des débuts plus difficiles puisqu'elle passait pour "immorale" dans la mesure où le décès de l'assuré était susceptible de procurer un avantage matériel à un tiers. Elle apparaissait également "dangereuse" pour l'assuré, dans la mesure où elle pouvait donner un intérêt au bénéficiaire de l'indemnité de "hâter le trépas de l'assuré".

La "Grande Ordonnance de la Marine" de Colbert de 1673 les considère comme "réprouvées et contre les bonnes mœurs".

En 1653, un banquier napolitain a suggéré à Mazarin la création d'associations dont les membres verseraient des cotisations dans une caisse commune, dont le contenu serait réparti, entre les membres survivants, à la fin d'une période déterminée (10 à 15 ans) : les "Tontines".

La Révolution marque un coup d'arrêt au développement des assurances en France.

En effet, la loi Le Chapelier du 14 juin 1791 a prohibé tout groupement ayant pour but la défense de "prétendus intérêts communs", et c'est ainsi qu'un décret du 24 Août 1793 a supprimé les Compagnies pratiquant des opérations d'assurance-vie.

Ceci n'empêchait pas Napoléon lui même de souscrire une assurance-vie auprès du Lloyd's de Londres en 1813....

Ce n'est qu'en 1818 qu'un arrêt du Conseil d'Etat finit par autoriser durablement l'assurance-décès.

C - SYSTEME D'INDEMNISATION

Si la nécessité de protéger les patrimoines individuels a donné lieu à l'invention du mécanisme contractuel de l'assurance, celui-ci a "débordé" sa vocation initiale.

D'abord conçue pour garantir la solvabilité de l'assuré, et le mettre à l'abri d'une dette de responsabilité, l'assurance permet également l'indemnisation des tiers victimes de dommages en leur accordant une action directe à l'encontre de son assureur de responsabilité, devenant ainsi un véritable "système d'indemnisation" d'intérêt public, au même titre que les Fonds de Garantie.

Le développement de l'assurance de responsabilité est donc devenu la pierre angulaire des systèmes d'indemnisation des sociétés modernes, laquelle a donné lieu à des assurances obligatoires dans les domaines de risques les plus importants, parmi lesquels on peut citer :

C'est ainsi qu'un mécanisme purement contractuel, et pourtant soumis au principe de l'effet relatif des Conventions de l'article 1199 du Code Civil entre parties contractantes, va permettre à des tiers lésés, en vertu d'une jurisprudence ancienne actuellement codifées dans l'article L 124-3-1 du Code des Assurances, d'agir directement contre l'assureur du responsable, avec lequel elles n'ont pourtant aucun lien de droit, d'obtenir l'indemnisation directe de leur préjudice.

C - INSTRUMENT DE CREDIT

L'assurance est également devenue un instrument de CREDIT :

D - EFFETS PERVERS

L'assurance peut entraîner parfois des effets pervers :

Mais le "produit" commercial d'assurance, du fait de sa complexité, peut s'avérer trompeur, lorsqu'il ne correspond pas à l'attente de l'assuré qui se voit parfois refuser des garanties qu'il avait pourtant cru souscrire de bonne foi.

Enfin, l'attitude de certains assureurs, se réfugiant abusivement derrière des clauses ambiguës ou équivoques pour échapper à leur obligation d'indemnisation, a pu discréditer la profession de l'Assurance aux yeux du public, des consommateurs et des juridictions.

C'est ainsi que la jurisprudence a mis à la charge des assureurs une obligation de conseil et d'information renforcée de nature à sauvegarder l'intégrité du consentement de l'assuré et à faire jouer les clauses ambiguës ou équivoques d'un contrat d'assurance en faveur de l'assuré.

Toutefois, les assureurs ont actuellement le souci de restaurer leur image, et d'offrir un véritable service d"accompagnement de leurs clients en cas de réalisation du risque assuré dans le cadre d'une démarche "qualité".


CHAPITRE II

LA MAITRISE DES RISQUES



  • Voir : L'Argus de l'Assurance : "Cartographie des risques émergents pour 2019"

    SECTION I - NECESSITE DE PROTECTION DES PARTICULIERS

    L'individu a toujours été vulnérable et exposé à des risques de toute nature, soit dans sa personne, soit dans ses biens.

    Dans les civilisations traditionnelles, l'individu appartenait et dépendait entièrement d'une communauté : tribu, famille, l'Homme n'avait pas "d'existence" ni de biens propres à protéger.

    De ce fait, la réparation des dommages causés aux biens ou aux personnes était assumée de façon collective par le groupe au titre de la solidarité familiale ou tribale.

    La réalisation du risque était vécue par la communauté comme relevant de la "fatalité" qu'il pouvait tenter de conjurer par des pratiques magiques ou religieuses.

    Les progrès techniques et économiques, ont permis à la communauté de réduire un très grand nombre de risques vitaux : épidémie, maladie, guerre, violence, famine... sans qu'il soit jamais possible de les éliminer tous.

    Mais l'évolution de la technologie fait naître des risques collectifs et individuels nouveaux : Risques climatiques, atteintes à l'environnement (pollution...), alimentaires (Lait contaminé), médicaments (Médiator...), sanitaires (Glyphosate...), pathologies liées au stress et aux écrans, atteintes à la vie privée...

    Dans le même temps, l'homme moderne :

    • a constitué autour de lui un "patrimoine" individuel exposé à la perte et à la ruine : maison, voiture, biens matériels, compte en banque, entreprise…
    • S'est isolé de sa "tribu" et de sa famille, pour intégrer une collectivité beaucoup plus vaste : nation, région, département, Commune...
    • S'est groupé, pour constituer des "personnes morales" titulaires d'un patrimoine exposé à la perte et à la ruine.

    Mais on peut penser que quel que soit le degré d'évolution technique et économique, l'Etre humain restera toujours menacé dans son intégrité physique et patrimoniale par les risques incompressibles de l'aléa : décès, maladie, accident, catastrophes naturelles, ruine...

    L'important est donc désormais que les risques soient mutualisés afin que chaque individu soit protégé contre les conséquences économiques de l'aléa, notamment lorsque lui-même, où ses ayants droits, se voient privés de revenus à la suite d'un évènement dommageable.

    Cette prévoyance s'est donc organisée sous plusieurs formes :

    • Assurances sociales obligatoires (Sécurité Sociale, assurances complémentaires…)
    • Assurances responsabilité civile obligatoires (circulation, construction, assurances professionnelles…)
    • Assurances de responsabilité civile systématiques : Entreprises, Chef de Famille, collectivités ...
    • Assurances de choses : incendie, vol, catastrophes naturelles, pertes financières...
    • Assurances "affinitaires" souvent proposées à des consommateurs accessoirement à d'autres produits par la grande distribution (Téléphonie mobile, produits multimédias, extensions de garanties, assurances voyages...)
    • Enfin, à défaut d'assurance, l'indemnisation est parfois attendue de Fonds de Garantie : Circulation, chasse, terrorisme, infractions, sang contaminé, amiante...

    Pour donner les capacités financières suffisantes, le risque doit être statistiquement "dilué" et le poids de l'indemnisation réparti sur la plus grande mutualité possible.

    Enfin, les assureurs modernes ont mis au point des Garanties Accidents de la Vie (G.A.V.) pour faire face à des aléas qui ne seraient pris en charge par aucun autre système d'indemnisation.

    Ils proposent également des services ainsi que des méthodes nouvelles de réparation des dommages en nature, telles que des prestations d'assistance, lesquelles constituent des obligations de faire.

    Ainsi, plutôt que de verser inutilement des capitaux qui peuvent être dilapidés ou affectés à d'autres fins que la réparation du dommage, la réparation en nature est particulièrement adaptée à la prise en charge dans le temps de handicaps lourds, nécessitant l'aide de tierces personnes : risque de dépendance : le "5e risque"...

    I - LES RISQUES PESANT SUR LES PATRIMOINES

    A - PERTE D'UN BIEN OU D'UN REVENU

    B - DETTE DE RESPONSABILITE CIVILE

    II - LES RISQUES PESANT SUR LES PERSONNES

    Malgré les progrès de la médecine et de la technologie, l'individu reste exposé à des risques d'atteinte à son intégrité physique, lesquels peuvent être inhérents à son état de santé ou à l'âge.

    Si certains de ces risques sont inéluctables (mort…) il est néanmoins possible de pallier au moins les conséquences économiques qu'ils induisent pour la personne ou sa famille.

    1. Dommages pécuniaires résultant d'une atteinte à la personne :
      • Versement d'indemnité compensant une perte de revenus en cas d'arrêt de travail pour maladie, invalidité, ou perte d'emploi.
      • Prise en charge du remboursement d'un emprunt.
      • Protection de la famille en cas de Décès, rentes éducation...
      • Versement d'un capital ou d'une rente en cas de vie à une date déterminée (système de garantie de retraite).

    2. Le système d'assurance de personne est un instrument de crédit, puisqu'il permet à un établissement prêteur d'avoir la certitude de remboursement d'un emprunt, du fait de la prise en charge de celui-ci par une garantie d'assurance en cas d'incapacité de travail ou de chômage.


    3. Il joue également un rôle important dans la gestion des patrimoines en permettant :
      • la prise en charge de droits de succession
      • le bénéfice de mesures fiscales favorables sur les indemnités.

    4. Constitution d'un régime de retraite et de prévoyance :
      • Soit par les particuliers
      • Soit par les entreprises pour le compte de leurs salariés, notamment dans le cadre d'un régime de prévoyance complémentaire obligatoire

    III - ASSISTANCE ET PROTECTION JURIDIQUE

    La réparation de certains dommages ne présente d'intérêt que si elle est effectuée "en nature", sous la forme d'un "service" rendu par l'assureur.

    1 - AIDE MATERIELLE D'URGENCE

    L'assuré peut se trouver confronté à des situations qui nécessitent une aide urgente et une assistance immédiate.

    Ce sera, par exemple, le cas :

    • d'un voyageur dans un pays étranger, qu'il faut secourir, rapatrier d'urgence, ou soigner dans une contrée éloignée, ou qui a perdu ses papiers...
    • D'un automobiliste en panne, qu'il faut remorquer, héberger et fournir un véhicule de remplacement...
    • D'un particulier, qui a perdu ses clefs, ou sa carte de crédit...
    • Relogement en cas d'incendie, intervention en cas de dégâts des eaux...
    • Retrait ou rappel de produits...
    • Rétablissement de l'image d'une entreprise en cas d'atteinte à l'e-réputation...
    • Usurpation d'identité...

    Dans certaines situations de détresse, les assureurs offrent des garanties d'assistance spécifiques (Europe Assistance...) souvent accesssoires à des cartes de crédit, contrats d'assurance automobile ou multirisques habitation, pour les particuliers, ou en matière de risques d'entreprise

    Il s'agit alors d'une véritable obligation de faire. pouvant faire l'objet de la procédure spécifique d'injonction de faire des articles 1425-1 à 9 du Code de Procédure Civile, ou d'une procédure de référé de l'article 809 du Code de Procédure Civile.

    2 - ASSISTANCE DE L'ASSURE EN JUSTICE

    Le problème rencontré par le particulier ou l'entreprise peut être de nature moins urgente, notamment lorsqu'il se trouve confronté à une situation conflictuelle qui l'oblige à se défendre ou à attaquer en justice pour sauvegarder ses légitimes intérêts.

    a. Assurance de protection juridique

    Les parties peuvent convenir que l'assureur s'engage, dans ce cas, à donner ou faire donner des avis et des conseils en matière juridique : assurance Protection Juridique.

      Est une opération d'assurance de protection juridique toute opération consistant, moyennant le paiement d'une prime ou d'une cotisation préalablement convenue, à prendre en charge des frais de procédure ou à fournir des services découlant de la couverture d'assurance, en cas de différend ou de litige opposant l'assuré à un tiers, en vue notamment de défendre ou représenter en demande l'assuré dans une procédure civile, pénale, administrative ou autre ou contre une réclamation dont il est l'objet ou d'obtenir réparation à l'amiable du dommage subi : (L 127-1 et ss du Code des Ass.)

    b. Clause de défense et recours

    La clause de défense et recours est accessoire à une garantie principale de responsabilité civile : circulation, habitation... Elle met à la charge de l'assureur l'indemnisation des frais de défense civile ou pénale de l'assuré poursuivi.

    Elle permet non seulement de garantir les frais de défense, mais également de recours à l'encontre d'une autre personne dans le cadre d'un sinistre garanti.

    Elle peut bénéficier aux personnes présentes dans un véhicule, si celles-ci sont également victimes de dommages corporels ou matériels.

    L'assureur prend alors en charge les frais et les honoraires d’avocat ou d'experts ainsi que de procédure devant une juridiction civile ou pénale, en fonction des plafonds et des montants définis dans le contrat d’assurance.

    c. Clause de direction de procès

    De telles garanties doivent être distinguées, de la clause d'un contrat d'assurance par laquelle l'assuré s'engage à mandater son assureur pour diriger le procès qui peut être dirigé contre lui par un tiers victime. Il s'agit de la clause de direction de procès insérée classiquement dans les contrats d'assurance de responsabilité.

    • Une telle clause, est un mandat d'intérêt commun qui a pour but de protéger les intérêts de l'assuré et de l'assureur appelé à supporter tout ou partie du coût de la réparation mise à la charge de son assuré à l'égard d'un tiers lésé, et sa mise en oeuvre n'est que facultative pour cet assureur.
    • De plus,l'article L 113-17 du Code des Assurances, dispose que l'assureur qui prend en charge la direction du procès dirigé contre son assuré est censé renoncé à ses exceptions de garantie : vrai piège pour l'assureur.

    SECTION II : LES RISQUES DES COLLECTIVITES

    I - GROUPEMENTS ASSOCIATIFS

    Les associations sportives ayant pour mission d'organiser de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres au cours des compétitions auxquelles ils participent, sont responsables, au sens de l'article 1242 du Code Civil, des dommages qu'ils causent à cette occasion, en cas de faute de leur part.

    II - RISQUES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

    A - CONTRATS DE DROIT PUBLIC

    Le contrat d'assurance n'était pas soumis au Code des Marchés Publics et a longtemps été considéré comme un contrat de droit privé.

    La loi du 22 Janvier 1997 a transposé fidèlement en droit français la directive communautaire 92-50 du 13 Juin 1992 qui prévoit le principe d'une mise en concurrence similaire à celle des marchés publics.

    Le décret du 27 février 1998 portant coordination des procédures de marchés publics a soumis la conclusion des contrats d'assurance intéressant des personnes publiques à la procédure de passation des marchés publics.

    L'article 2 de la loi MURCEF du 11 Décembre 2001 prévoit que les marchés passés en application du Code des Marchés Publics ont le caractère de contrats administratifs.

    Dès lors que le Cahier des Charges comporte des "dispositions exorbitantes de droit public", le contentieux des contrats d'assurance relève désormais des Juridictions administratives, y compris en ce qui concerne l'action directe des victimes à l'encontre des assureurs des collectivités publiques.

    B - LES RISQUES ASSURABLES

    • Propriétaire d'immeubles...
    • Responsable de l'entretien de la voirie, des réseaux d'eau, des services de secours (pompiers...), élagage des arbres, etc...
    • Organisateur de fêtes et de manifestations sportives
    • Services destinés aux enfants : centres aérés, colonies de vacances
    • Dommages subis par les bénévoles ou collaborateurs occasionnels
    • Accident survenu à un élu dans l'exercice de ses fonctions
    • Stations d'épuration, collecte des ordures ménagères...

    C - LA RESPONSABILITE PERSONNELLE DES AGENTS TERRITORIAUX

    • Pour faute personnelle détachable du service
    • Pour faute de service

    D - LA RESPONSABILITE PERSONNELLE DES ELUS

    III - ETABLISSEMENTS PUBLICS

    • Hôpitaux
    • Etablissements de recherches, CNRS...



    CHAPITRE III

    LES RISQUES DE L'ENTREPRISE

    Les 10 risques les plus redoutés par les entreprises en 2018

    1
    Interruption d'activités
    2
    Cyber-risques - Rupture de la supply-chain
    3
    Incendie - Explosion
    4
    Evolutions législatives - Risques juridiques
    5
    Catastrophes naturelles
    6
    Evolutions et fluctuations de marchés
    7
    Risque produit
    8
    Nouvelles technologies
    9
    Atteintes à la réputation et à l'image
    10
    Malveillance, vol, fraude


    I - RISQUES DE DOMMAGES AUX BIENS D'EXPLOITATION DE L'ENTREPRISE ET SES CONSEQUENCES

    A - INVENTAIRE DU PATRIMOINE DE L'ENTREPRISE

    1 - BIENS MATERIELS

    B - EVENEMENTS GENERATEURS DE DOMMAGES AUX BIENS

    1 - NATURE DES DOMMAGES

    2 - Conséquences financières de dommages aux biens : Pertes d'exploitation.

    La perte d'exploitation (PE) correspond aux pertes financières ou un manque à gagner causés à une entreprise par un sinistre de nature à entraîner une perte de production : (incendie, inondation, bris de machine, avarie de transport, rupture de la supply chain, etc..)

    Un sinistre petua voir des répercussions sur le Chiffre d'affaires de l'entreprise qui doit pourtant faire face à des charges fixes : amortissements, impôts et taxes, loyers, rémunérations du personnel, intérêts d'emprunts, etc.

    Des frais exceptionnels sont également à ajouter : location de matériel ou de locaux, installations provisoires, frais de publicité pour retrouver une clientèle..

    L'assurance des pertes d'exploitation est destinée à essayer de replacer l'entreprise dans la situation financière qui aurait été la sienne si le sinistre n'avait pas eu lieu.

    C- RISQUES DE RESPONSABILITE CIVILE DE L'ENTREPRISE

    La responsabilité Civile de l'entreprise est susceptible d'être engagée :

    A - Du fait de son exploitation, tant aux personnes de l'entreprise qu'à des tiers

    B - Du fait de ses prestations ou produits : Produits défectueux mis sur le marché, ou travaux ou prestations réalisés pour le compte des clients

    II - RISQUES LIES AU PERSONNEL DE L'ENTREPRISE : Prévoyance complémentaire

    L'assurance de groupe est un moyen privilégié permettant à l'employeur de mettre en place un régime de prévoyance complémentaire au profit de ses salariés. (Voir dossier complet de l'IRDES : "La protection sociale complémentaire en France", Aspects historiques et réglementaires - mai 2019)

    La loi n°2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi a entériné les textes conventionnels (accord national interprofessionnel, accord de branche, convention collective) imposent à l'employeur de compléter ces garanties Arrêts de travail, invalidité, incapacité, décès, maladie, maternité, qui ne sont couverts que partiellement par le régime de base de la Sécurité Sociale, par des régimes collectifs de protection sociale.


    SECTION II - LA PREVENTION DES RISQUES DE L'ENTREPRISE

    I - REDUCTION DES RISQUES :



    II - TRANSFERTS JURIDIQUES DES RISQUES

    A - EMERGENCE D'UN RISQUE JURIDIQUE

    On assiste à l'émergence d'un risque juridique qui résulte de la conjonction de plusieurs phénomènes :

    • Bouleversement des principes juridiques de base, notamment du fait du développement d'un droit autonome de la Consommation.
    • Inflation de textes législatifs et réglementaires, dans tous les domaines d'activité de l'entreprise : règles de sécurité, normes de fabrication...
    • Elargissement du domaine de la Responsabilité civile et pénales des entreprises du fait des agissements des personnes dont elles doivent répondre : dirigeants, salariés, collaborateurs... (Harcélement...)
    • Responsabilité pénale des personnes morales et de leurs dirigeants du fait de leur gestion.
    • Application parfois aléatoire du droit par des juridictions hésitantes.
    • Mise en cause de l'entreprise pour pratique anti-concurrentielle...

    B - CLAUSES LIMITATIVES DE RESPONSABILITE

    Elles sont en principe valides en matière contractuelle, sous réserve de nombreuses exceptions :

    C - CLAUSES D'ABANDON DE RECOURS

    Le cas se présente de la façon suivante :

    De telles clauses sont également fréquentes en matière de contrat de bail, et sont permises du fait de l'existence de garanties d'assurance obligatoire, notamment de la part du locataire.

    D - PACTE DE GARANTIE OU D'ASSURANCE

    Il s'agit de la clause selon laquelle une entreprise garantit une autre entreprise, notamment sa sous-traitante, contre les responsabilités contractuelles ou quasi délictuelle que celle-ci peut encourir, ou contre les dommages causés à ses biens.

    Si cette clause devrait normalement jouer en faveur des petites entreprises, la pratique des marchés publics met souvent cette couverture à la charge des petits entrepreneurs.

    E - ASSURANCES POUR COMPTE COMMUN

    C'est le cas :

    • de la société mère qui souscrit une police d'assurance pour le compte de ses filiales
    • de l'entreprise donneuse d'ordre qui souscrit une assurance non seulement pour son propre compte, mais également pour celui de ses sous-traitants.
    • du Maître de l'ouvrage qui souscrit une Police Unique de Chantier ou une Tous Risques Chantier (TRC), parfois assortie également d'une garantie "Montage, Essais, Maintenance" (TRME) pour la réalisation d'installations industrielles, qui couvre :
      • les dommages causés à l'ouvrage et aux tiers en cours de construction

      • la responsabilité individuelle des constructeurs ou des intervenants sur le chantier.
    • du transporteur qui souscrit une Police d'assurance marchandises transportées destinée à garantir :
      • le propriétaire de la marchandise contre les dommages subis par celle-ci
      • sa propre responsabilité de transporteur à l'égard de l'expéditeur.



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