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Jean-François CARLOT - Docteur en Droit - Avocat Honoraire

CONTENTIEUX DU RISQUE, de la RESPONSABILITE et de l'ASSURANCE
Jurisprudence 2e Sem. 2022
VEILLE JURISPRUDENTIELLE du 1er Semestre 2023









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RESPONSABILITES

Revirement de Jurisprudence : point de départ de la prescription de l'action en responsabilité contre un avocat

A l'issue du prononcé d'un divorce, un jugement du 26 janvier 2012 a statué sur les opérations de liquidation de leur régime matrimonial.

Le 26 mars 2012, l'époux représenté par son avocat, en a interjeté appel.

Par ordonnance du 9 octobre 2012, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité de la déclaration d'appel à la date du 26 juin 2012. Le 16 octobre 2017, l'époux a assigné en responsabilité civile l'avocat, qui lui a opposé la prescription de son action sur le fondement de l'article 2225 du Code Civil. moyen

Selon l'article 2225 du Code Civil, l'action en responsabilité dirigée contre les personnes ayant assisté ou représenté les parties en justice se prescrit par cinq ans à compter de la fin de leur mission.

Il résulte de l'article 412 du Code de procédure civile que la mission d'assistance en justice emporte pour l'avocat l'obligation d'informer son client sur les voies de recours existant contre les décisions rendues à l'encontre de celui-ci.

Selon l'article 13 du décret n° 2005- 790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat, l'avocat conduit jusqu'à son terme l'affaire dont il est chargé, sauf si son client l'en décharge ou s'il décide de ne pas poursuivre sa mission.

La Cour de cassation a jugé que l'action en responsabilité contre un avocat au titre d'une faute commise dans l'exécution de sa mission d'interjeter appel se prescrit à compter du prononcé de la décision constatant l'irrecevabilité de l'appel (Cass. Civ. I, 14 janvier 2016,14-23.200).

Toutefois, si cette jurisprudence permet de fixer un point de départ unique à la prescription de l'action en responsabilité formée contre un avocat, elle se concilie toutefois difficilement avec d'autres dispositions, telles que celles des deux derniers textes précités.

C'est pourquoi, il y a lieu de déduire désormais de la combinaison des textes précités que le délai de prescription de l'action en responsabilité du client contre son avocat, au titre des fautes commises dans l'exécution de sa mission, court à compter de l'expiration du délai de recours contre la décision ayant terminé l'instance pour laquelle il avait reçu mandat de représenter et d'assister son client, à moins que les relations entre le client et son avocat aient cessé avant cette date.

En l'espèce, la Cour d'Appel ne pouvait donc déclarer irrecevable l'action en responsabilité engagée à l'encontre de l'avocat au motif que sa mission de l'avocat avait pris fin au jour de la décision constatant la caducité de l'appel du 9 Octobre 2012, alors qu'elle avait constaté que le client avait mis fin à sa collaboration avec l'avocat par lettre du 23 octobre 2012, de sorte que la prescription avait commencé à courir à compter de cette date, précédant celle de l'expiration du délai de déféré, et qu'elle n'était donc pas acquise à la date de l'assignation du 16 Octobre 2017.

Produits défectueux : Responsabilité du producteur d'électricité du fait d'une surtension

Selon l'article 2 de la directive 85/374/CEE, (transposée dans les articles 1386-1 à 1386-18, devenus 1245 à 1245-17, du code civil) pour l'application de cette directive, le terme « produit » désigne également l'électricité et, selon l'article 3, paragraphe 1, le terme « producteur » désigne le fabricant d'un produit fini, le producteur d'une matière première ou le fabricant d'une partie composante, et toute personne qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif.

Aux termes de l'article 1386-3, devenu 1245-2, du code civil, l'électricité est considérée comme un produit et, aux termes de l'article 1386-6, devenu 1245-5, alinéa 1er, du même code, est producteur, lorsqu'il agit à titre professionnel, le fabricant d'un produit fini, le producteur d'une matière première, le fabricant d'une partie composante.

La CJUE a dit pour droit que « L'article 3, paragraphe 1, de la directive ... doit être interprété en ce sens que le gestionnaire d'un réseau de distribution d'électricité doit être considéré comme étant un « producteur », au sens de cette disposition, dès lors qu'il modifie le niveau de tension de l'électricité en vue de sa distribution au client final. »

Elle a, à cet effet, précisé qu'un gestionnaire d'un réseau de distribution d'électricité ne se limite pas à livrer de l'électricité, mais participe au processus de sa production en modifiant une de ses caractéristiques, à savoir sa tension, en vue de la mettre en état d'être offerte au public aux fins d'être utilisée ou consommée.

Il en résulte que le gestionnaire d'un réseau de distribution d'électricité doit être considéré comme un « producteur », au sens de l'article 1386-6, devenu 1245-5, alinéa 1er, du code civil, dès lors qu'il modifie le niveau de tension de l'électricité en vue de sa distribution au client final.

Il résulte de l'article 1386-18, devenu 1245-17, du code civil, que, si le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux n'exclut pas l'application d'autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, c'est à la condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents.

Ayant retenu, en premier lieu, que l'électricité constitue au sens de l'article 1386-3 du code civil un produit, en deuxième lieu, qu'il était établi que le dommage était consécutif à une surtension, liée elle-même à une rupture du neutre du réseau de distribution triphasé d'[Enedis], en troisième lieu, que cette surtension était constitutive d'un défaut de sécurité, ce dont elle a déduit que le litige ressortait du seul régime de la responsabilité pour produits défectueux, dès lors que l'action était dirigée contre Enedis, qui est un producteur, en raison d'un défaut de sécurité du produit litigieux, la cour d'appel, qui a ainsi exclu que le manquement invoqué à l'obligation de résultat d'entretien des branchements du réseau constitue un fondement distinct du défaut du produit en cause et procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision.

Notion de trouble anormal de voisinage

L'anormalité du trouble de voisinage peut résulter du fait que des arbres avaient puisse avoir atteint une hauteur conséquente, supérieure à vingt mètres, qu'en cas de tempête, ils risquaient d'endommager gravement une maison voisine, que ces risques certains s'étaient déjà réalisés à l'occasion d'une tempête, la toiture et la gouttière de cette maison ayant été endommagées par la chute de branches, et que l'accumulation de brindilles et végétation était désormais excessive, démultipliant l'ampleur des nettoyages à réaliser en toiture.

Dès lors que la présence de ces six cèdres présentait un danger pour la sécurité des biens, constitutif d'un trouble anormal de voisinage, et leur abattage peut constituer la mesure propre à y mettre un terme, sans qu'il soit nécessaire de procéder à des recherches sur l'antériorité des arbres et le caractère proportionné de la mesure ordonnée.

Convention d'assistance bénévole

Il résulte de l'article 1101 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 que dans une convention d'assistance bénévole, l'assistance peut être spontanément apportée par l'assistant ou sollicitée par l'assisté.

Viole ce texte l'arrêt qui écarte l'existence d'une convention d'assistance bénévole, au motif que l'assistant n'a pas offert spontanément son aide à l'assisté, mais a été convaincu par celui-ci de lui prêter son concours.

Suspension de la prescription de l'action récursoire contre le fabricant de matériaux

Pour les ventes conclues antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, il est jugé que les vices affectant les matériaux ou les éléments d'équipement mis en oeuvre par un constructeur ne constituent pas une cause susceptible de l'exonérer de la responsabilité qu'il encourt à l'égard du maître de l'ouvrage, quel que soit le fondement de cette responsabilité.

Sauf à porter une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge, le constructeur dont la responsabilité est ainsi retenue en raison des vices affectant les matériaux qu'il a mis en oeuvre pour la réalisation de l'ouvrage, doit pouvoir exercer une action récursoire contre son vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés sans voir son action enfermée dans un délai de prescription courant à compter de la vente initiale.

Il s'ensuit que, l'entrepreneur ne pouvant pas agir contre le vendeur et le fabricant avant d'avoir été lui-même assigné par le maître de l'ouvrage, le point de départ du délai qui lui est imparti par l'article 1648, alinéa 1, du code civil est constitué par la date de sa propre assignation et que le délai de l'article L. 110-4, I, du code de commerce, courant à compter de la vente, est suspendu jusqu'à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l'ouvrage (3e Civ., 16 février 2022, pourvoi n° 20-19.047, publié).

Dès lors que le vendeur peut voir, ainsi, sa garantie recherchée par le constructeur et qu'il ne peut, non plus, agir avant d'avoir été assigné, le recours contre son propre vendeur ne peut, pas plus, être enfermé dans le délai de prescription de droit commun courant à compter de la vente initiale.

La prescription de ce recours est elle-même suspendue jusqu'à ce que la responsabilité de son auteur soit recherchée.

Point de départ de la prescription contre le fournisseur de matériaux

Aux termes de l'article 2 du code civil, la loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif.

Selon l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans, ramenés à cinq ans par la loi précitée, si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Les dispositions transitoires prévues par l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 pour la durée des prescriptions en cours à la date d'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 n'ont pas pour effet de modifier le point de départ du délai de la prescription extinctive ayant commencé à courir antérieurement à cette date (3e Civ., 24 janvier 2019, pourvoi n° 17-25.793 ; 3 Civ., 16 septembre 2021, pourvoi n° 20-17.625, publié).

Il est jugé, pour les ventes antérieures à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, que le délai de prescription applicable entre commerçants et entre commerçants et non-commerçants à l'action contractuelle directe du maître de l'ouvrage contre le fabricant, fondée sur la non-conformité des matériaux, court à compter de la livraison des matériaux à l'entrepreneur (3e Civ., 26 juin 2002, pourvoi n° 00-12.023, Bull. 2002, III, n° 148 ; 3e Civ., 7 juin 2018, pourvoi n° 17-10.394, Bull. 2018, III, n° 59).

Pour déclarer recevable comme non prescrite l'action du maître de l'ouvrage contre le fournisseur des matériaux, commerçant, l'arrêt retient que le point de départ de la prescription est celui prévu par l'article 2224 du code civil, soit le jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il constate, ensuite, que l'entrepreneur a été informé des désordres le 20 novembre 2012 et que le maître de l'ouvrage a assigné le vendeur moins de cinq ans après cette date.

En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les matériaux en cause avaient été livrés avant le 19 juin 2008, de sorte que la prescription de l'action directe du maître de l'ouvrage contre le vendeur avait commencé à courir à compter de la livraison, sans pouvoir expirer, en l'absence d'interruption ou de suspension, plus de cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Faute inexcusable de l'employeur

Interruption de la prescription

Il résulte de la combinaison des articles L. 431-2 du code de la sécurité sociale et 2241 du code civil que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur interrompt la prescription à l'égard de toute autre action procédant du même fait dommageable.

Dès lors, c'est à bon droit qu'une cour d'appel, ayant constaté que l'action en reconnaissance de faute inexcusable engagée par la victime contre son dernier employeur avait été introduite dans le délai de prescription de deux ans, en a déduit que cette action avait eu pour effet d'interrompre la prescription à l'égard d'un précédent employeur au service duquel le salarié avait également été exposé au risque, de sorte que son action était recevable.

Revirement - La rente AT ne répare plus le DFP

Selon les articles L. 434-1 et L. 434-2 du CSS, la rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle atteinte d'une incapacité permanente égale ou supérieure au taux de 10 % prévu par l'article R. 434-1 du même code est égale au salaire annuel multiplié par le taux d'incapacité qui peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité de celle-ci.

Selon L. 452-3, indépendamment de la majoration de la rente qu'elle reçoit en vertu du troisième, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

La Cour de cassation juge depuis 2009 que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent (Crim., 19 mai 2009, pourvois n° 08-86.050 et 08-86.485, Bull. crim. 2009, n° 97 ; 2e Civ., 11 juin 2009, pourvois n° 08-17.581, Bull. 2009, II, n° 155 ; pourvoi n° 07-21.768, Bull 2009, II, n° 153 ; pourvoi n° 08- 16.089, Bull. 2009, II, n° 154).

Elle n'admet que la victime percevant une rente d'accident du travail puisse obtenir une réparation distincte des souffrances physiques et morales qu'à la condition qu'il soit démontré que celles-ci n'ont pas été indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent (2e Civ., 28 février 2013, pourvoi n° 11-21.015, Bull. 2013, II, n° 48).

Si cette jurisprudence est justifiée par le souhait d'éviter des situations de double indemnisation du préjudice, elle est de nature néanmoins ...à se concilier imparfaitement avec le caractère forfaitaire de la rente au regard du mode de calcul de celle-ci, tenant compte du salaire de référence et reposant sur le taux d'incapacité permanente défini à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.

Par ailleurs, il ressort des décisions des juges du fond que les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles éprouvent parfois des difficultés à administrer la preuve de ce que la rente n'indemnise pas le poste de préjudice personnel du déficit fonctionnel permanent.

Enfin, le Conseil d'Etat juge de façon constante qu'eu égard à sa finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail, qui lui est assignée à l'article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, et à son mode de calcul, appliquant au salaire de référence de la victime le taux d'incapacité permanente défini à l'article L. 434-2 du même code, la rente d'accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est à-dire ses pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et que dès lors, le recours exercé par une caisse de sécurité sociale au titre d'une telle rente ne saurait s'exercer que sur ces deux postes de préjudice et non sur un poste de préjudice personnel (CE, section, avis, 8 mars 2013, n° 361273, publié au Recueil Lebon ; CE, 23 décembre 2015, n° 374628 ; CE, 18 oct. 2017, n° 404065).

L'ensemble de ces considérations conduit la Cour à juger désormais que la rente Accident du Travail ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.

Amiante : Préjudice d'anxiété réparable par des tiers

Un salarié exposé à l’amiante peut demander réparation de son préjudice d’anxiété à l’entreprise au sein de laquelle il a été chargé de réaliser un travail de sous-traitance, alors même que cette entreprise n’était pas son employeur.

Amiante : Atteinte à la dignité du salarié

Il résulte de l'article L. 1222-1 du code du travail que l'atteinte à la dignité de son salarié constitue pour l'employeur un manquement grave à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail (Soc., 7 février 2012, pourvoi n° 10-18.686, Bull. 2012).

La cour d'appel qui constate que l'employeur, qui avait bénéficié d'une dérogation jusqu'au 31 décembre 2001 l'autorisant à poursuivre l'utilisation de l'amiante malgré l'entrée en vigueur du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante, et continué, en toute illégalité, à utiliser ce matériau de 2002 à 2005 alors qu'il n'était plus titulaire d'aucune autorisation dérogatoire, retient à bon droit que celui-ci a manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail.

Assurance Dommage-Ouvrage

Mesures conservatoires nécessaires à la non aggravation de dommages

Il résulte de l'annexe II à l'article A. 243-1 du code des assurances que sont couvertes par l'assurance dommages-ouvrage les mesures conservatoires nécessaires à la non-aggravation des dommages dans l'attente des travaux de réparation.

La cour d'appel a relevé la défaillance généralisée du système de sécurité incendie et retenu que le maintien d'un service de surveillance permanente par des agents de sécurité incendie n'avait pas un caractère conservatoire puisqu'il avait pour objet, non de protéger l'ouvrage dans l'attente des travaux de réparation des désordres, mais de permettre à la clinique de poursuivre ses activités dans l'attente des réparations.

Elle en a exactement déduit que les frais de surveillance par des agents de sécurité incendie, qui n'étaient pas nécessaires à la non-aggravation des dommages à l'ouvrage, constituaient un dommage immatériel consécutif aux désordres décennaux.

Nécessité de réparation efficace et pérenne

Aux termes de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il est jugé que l'assureur dommages-ouvrage manque à ses obligations contractuelles en ne préfinançant pas une réparation efficace et perenne de nature à mettre fin aux désordres (3e Civ., 11 février 2009, pourvoi n° 07-21.761, Bull. 2009, III, n°33).

Notion de vice apparent

Le caractère apparent d'un vice de construction doit s'apprécier au regard du maître de l'ouvrage lui-même et non pas du technicien assistant celui-ci dans les opérations de réception.

En l'espèce aucun élément ne permettait d'établir que le maître de l'ouvrage était suffisamment averti pour déceler le défaut de conformité du câblage et les malfaçons susceptibles de compromettre l'étanchéité du bâtiment.

la cour d'appel a pu en déduire qu'il n'était pas établi que le maître de l'ouvrage avait eu connaissance de la persistance des infiltrations au jour de la réception, de sorte que les désordres ne pouvaient pas être considérés comme apparents à la réception.

Limite de la réparation intégrale

En application du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit, une victime ne peut être indemnisée deux fois en réparation d'un même préjudice.

Dès lors, encourt la cassation une cour d'appel qui alloue à une victime une somme au titre du « retentissement économique définitif après consolidation », calculée sur la base du coût horaire d'embauche d'un salarié, capitalisé pour l'avenir, alors que pour lui allouer une somme distincte au titre de sa perte future de revenus personnels, elle avait pris en considération la diminution du bénéfice annuel de son exploitation, qui inclut nécessairement le surcoût de charges lié à l'embauche d'un salarié.



ASSURANCES


Le véritable bénéficiaire d'une indemnité d'assurance de responsabilité est l'assuré et non le tiers lésé

Il résulte de l'article 1376, devenu 1302-1, du code civil que celui qui reçoit d'un assureur le paiement d'une indemnité à laquelle il a droit, ne bénéficie pas d'un paiement indu, le bénéficiaire de ce paiement étant celui dont la dette se trouve acquittée par quelqu'un qui ne la doit pas.

Ainsi, lorsqu'un assureur de responsabilité règle par erreur à un tiers lésé une indemnité d'assurance excédant son plafond de garantie, il ne peut pas demander le remboursement tu trop versé au tiers lésé au titre de la répétition de l'indu.

Il en résulte qu'il ne peut réclamer ce trop versé au delà de son plafond de garantie qu'à son assuré.

Circulation internationale : Loi applicable en cas de recours concernant les assureurs

Selon l'article 3 de la Convention de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable en matière d'accidents de la circulation routière, la loi applicable à la responsabilité civile extra-contractuelle découlant d'un accident de la circulation routière est la loi interne de l'Etat sur le territoire duquel l'accident est survenu.

Toutefois, selon l'article 2 de cette Convention, n'entrent pas dans le champ d'application de la Convention les recours et les subrogations concernant les assureurs.

Il résulte de ce dernier texte qu'est exclue du champ d'application de la Convention la détermination de la loi applicable à l'obligation contractuelle en vertu de laquelle un assureur est tenu d'indemniser la victime d'un accident de la circulation routière.

En revanche, n'est pas exclue du champ d'application de la Convention la détermination de la loi applicable à l'obligation extra-contractuelle en vertu de laquelle la personne responsable du dommage est tenue d'indemniser la victime ou l'assureur subrogé dans les droits de celle-ci.

En l'espèce, ayant constaté que l'assureur d'une remorque, agissait en tant que subrogé dans les droits de la victime contre le propriétaire du tracteur impliqué dans un accident survenu en Espagne, la cour d'appel en a exactement déduit que, conformément à l'article 2 de la Convention de La Haye du 4 mai 1971, la loi espagnole soumettant l'action en responsabilité à un délai de prescription d'un an à compter de la découverte par la victime de la faute ayant causé le dommage était applicable, de sorte que l'action introduite par cet assureur était irrecevable comme prescrite.

Assurance automobile : Pas de recours contre le passager garanti

Selon l'article L. 211-1 du code des assurances, toute personne dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers dans la réalisation desquels un véhicule est impliqué, doit, pour faire circuler celui-ci, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité.

Selon le deuxième alinéa, les contrats d'assurance couvrant cette responsabilité doivent également couvrir la responsabilité civile des passagers du véhicule objet de l'assurance.

Aux termes du troisième alinéa, l'assureur est subrogé dans les droits que possède le créancier de l'indemnité contre la personne responsable de l'accident lorsque la garde ou la conduite du véhicule a été obtenue contre le gré du propriétaire.

Il résulte de ces dispositions qu'après avoir indemnisé la victime d'un accident de la circulation sur le fondement de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, en raison de l'implication du véhicule objet de l'assurance, l'assureur, tenu de garantir également la responsabilité civile des passagers de ce véhicule, ne peut exercer de recours subrogatoire contre ces derniers.

Dès lors que la responsabilité civile du passager est garantie par l'assureur qui avait indemnisé les ayants droit de la victime, le passager ne peut donc pas faire l'objet d'un recours subrogatoire, de la part de cet assureur, à raison de la faute qu'il avait commise.

Assurance de groupe : Inopposabilité de l'exclusion de garantie à l'adhérent

Il résulte de l'article L. 141-4 du code des assurances que le souscripteur d'une assurance de groupe est tenu de remettre à l'adhérent une notice établie par l'assureur qui définit les garanties et leurs modalités d'entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre et que la preuve de cette remise incombe au souscripteur.

Dans la mesure où la preuve de la remise de cette notice n'est pas rapportée, la clause d'exclusion de garantie figurant dans la police n'est pas opposable à l'adhérent.

Appréciation du caractère limité de la clause d'exclusion de risque

Il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée.

Une clause d'exclusion n'est pas limitée lorsqu'elle vide la garantie de sa substance, en ce qu'après son application elle ne laisse subsister qu'une garantie dérisoire.

Pour rejeter les demandes d'indemnisation de l'assurée, un arrêt, après avoir énoncé que les pertes d'exploitation ne sont pas couvertes en cas de sinistre causé par une explosion d'explosif ou de produits assimilés, indique que la police d'assurance a vocation à s'appliquer à de multiples sinistres attachés à l'incendie, la foudre, certaines explosions, les tempêtes, les dégâts des eaux, les actes de malveillance, de sorte qu'elle n'est pas privée de substance.

En statuant ainsi, alors que le caractère limité de la clause d'exclusion litigieuse devait être apprécié en considération de la garantie « explosion » souscrite par l'assurée, et non au regard de l'ensemble des garanties visées au contrat d'assurance, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Notion de faute dolosive et disparition de l'aléa

Selon l'article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. La faute dolosive s'entend d'un acte délibéré de l'assuré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables (2e Civ., 20 janvier 2022, pourvoi n° 20-13.245, publié au bulletin).

En utilisant, sans autorisation, dans des restaurants au Royaume-Uni et en Europe et, dès lors, soumises à un large public, des reproductions dont la similitude avec des oeuvres d'un tiers est incontestable, malgré la clause contractuelle d'originalité la liant aux sociétés McDonald's, la société Atelier archange a pris un risque ayant pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, excluant la garantie de l'assureur.

Ayant retenu que l'assurée avait commis une faute dolosive, laquelle n'impliquait pas la volonté de son auteur de créer le dommage, la cour d'appel en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'assureur n'avait pas à répondre des dommages.

Le suicide n'est pas couvert par les contrats garantissant les accidents corporels

Il résulte de l'article L. 132-7 du code des assurances que si l'assurance en cas de décès est de nul effet si l'assuré se donne volontairement la mort au cours de la première année du contrat, elle doit couvrir le risque de suicide à compter de la deuxième année du contrat.

Le caractère accidentel du décès constitue une circonstance qui, s'agissant de l'application d'un contrat d'assurance couvrant les accidents corporels, est une condition de la garantie.

Dès lors, sauf stipulation contraire, le suicide n'est pas couvert par les contrats garantissant les accidents corporels, auxquels ce texte n'est pas applicable.

Notion de passé connu

Il n'est pas nécessaire, pour caractériser le passé connu, qu'outre la connaissance par l'assuré du fait dommageable, la réclamation de la victime soit inéluctable et il suffit que l'assuré ait eu connaissance, avant la souscription du contrat, d'un fait dommageable ou d'un fait susceptible d'engager sa responsabilité, peu important que la réclamation fût encore incertaine.

En l'espèce, pour rejeter la demande de la société SNPE en paiement d'une indemnité d'assurance, un arrêt a retenu que cette société avait connaissance, à compter du 10 février 2005 au moins, du caractère dommageable, pour la société Bayer, de l'arrêt de la production de phosgène et du fait que sa responsabilité pouvait être engagée à ce titre, ce dont elle a pris connaissance par l'assignation délivrée par la société Grande Paroisse en février 2005, soit antérieurement à la souscription du contrat d'assurance, en septembre 2005…

Formalisme de la prescription

Si en vertu de l'article R. 112-1 du code des assurances l'assureur doit rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription biennale édicté par l'article L. 114-1, les différentes causes d'interruption de prescription mentionnées à l'article L. 114-2 et le point de départ de la prescription, il n'est pas tenu de préciser qu'en application de l'article 2243 du code civil, l'interruption de prescription est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande, laisse périmer l'instance ou si sa demande est définitivement rejetée.




PROCEDURE


Compétence du Juge civil, même en l'absence d'utilisation de l'article 470-1 du Code Pénal

Selon l'article 1355 du Code Civil,l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

Selon une jurisprudence constante (Ass. Plén., 7 juillet 2006, pourvoi n° 04-10.672, Bull. 2006, Ass. Plén., n° 8), il incombe au demandeur à l'action de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci.

Selon l'article 470-1 du Code Civil, le tribunal saisi, à l'initiative du ministère public ou sur renvoi d'une juridiction d'instruction, de poursuites exercées pour une infraction non intentionnelle au sens des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 121-3 du code pénal, et qui prononce une relaxe demeure compétent, sur la demande de la partie civile ou de son assureur formulée avant la clôture des débats, pour accorder, en application des règles du droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite.

En application du principe selon lequel il incombe au demandeur à l'action de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, lorsque la partie civile sollicite du juge pénal qu'il se prononce selon les règles du droit civil, elle doit présenter l'ensemble des moyens qu'elle estime de nature à fonder ses demandes, de sorte qu'elle ne peut saisir le juge civil des mêmes demandes, fussent-elles fondées sur d'autres moyens.

En revanche, lorsque la partie civile n'a pas usé de la faculté qui lui est ouverte par l'article 470-1 du code de procédure pénale, elle ne peut être privée de la possibilité de présenter ses demandes de réparation devant le juge civil.

L'interprétation contraire aboutirait à priver d'effet l'option de compétence qui lui est ouverte par la loi n° 83-608 du 8 juillet 1983 dans le but de garantir le droit effectif de toute victime d'infraction d'obtenir l'indemnisation de son préjudice.

Représentation d'un même assureur par plusieurs avocats

L'article 414 du code de procédure civile dispose qu'une partie n'est admise à se faire représenter que par une seule des personnes, physiques ou morales, habilitées par la loi.

L'article 4.1 du RIN énonce que l'avocat ne peut être ni le conseil ni le représentant ou le défenseur de plus d'un client dans une même affaire s'il y a conflit entre les intérêts de ses clients ou, sauf accord des parties, s'il existe un risque sérieux d'un tel conflit. Sauf accord écrit des parties, il s'abstient de s'occuper des affaires de tous les clients concernés lorsque surgit un conflit d'intérêt, lorsque le secret professionnel risque d'être violé ou lorsque son indépendance risque de ne plus être entière.

La société d'assurance partie à un litige à raison de plusieurs contrats couvrant différentes personnes, dont les intérêts peuvent être divergents, ne peut pas être représentée par un seul et même avocat sans risque de conflit d'intérêts et de manquement aux obligations déontologiques de ce dernier, plus particulièrement encore lorsqu'en application des dispositions de l'article L113-17 du code des assurances, l'assureur prend la direction du procès intenté à son assuré.

Il résulte de ce qui précède que, lorsqu'une société d'assurance est partie à un litige à raison de plusieurs contrats couvrant différentes personnes, l'article 414 du code de procédure civile ne fait pas obstacle à ce qu'elle soit représentée par autant d'avocats que de personnes assurées.

Prescription de l'action directe en matière de redressement fiscal

Il résulte de l'article 2224 du Code Civil que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

La notification de redressement est le point de départ d'une procédure contradictoire, à l'issue de laquelle l'administration fiscale peut ne mettre en recouvrement aucune imposition, de sorte qu'à la date de cette notification, le dommage constitué des impositions supplémentaires mises à la charge de ses clients à raison des manquements d'un conseiller en gestion de patrimoine ou en investissements financiers à ses obligations n'est pas encore réalisé.

La prescription d'une action en responsabilité court donc à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

Lorsque le contribuable conteste en justice un redressement fiscal, le dommage résultant de ce redressement n'est réalisé qu'à la date à laquelle le recours est rejeté par le juge de l'impôt.




LEGISLATION





DOCTRINE



    li> La motivation de la résiliation du contrat d'assurance par l'assureur : RGDA mai 2023, n° RGA201h4, note Nicolas Leblond
  • Le règlement amiable en assurance de protection juridique : du droit positif au droit prospectif : RGDA mars 2023, n° RGA201f8, étude Guillaume Brunel,