Jurisprudence 1er sem. 2019
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Jean-François CARLOT, Docteur en Droit, Avocat Honoraire, Médiateur
CONTENTIEUX DU RISQUE, de la RESPONSABILITE et de l'ASSURANCE
VEILLE JURISPRUDENTIELLE du 2e semestre 2019








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RESPONSABILITES

PRODUITS DEFECTUEUX : DEPAKINE - POINT DE DEPART DE LA PRESCRIPTION

En application de l'article 1245-16 du code civil, l'action en réparation fondée sur les dispositions du titre IV bis du livre troisième du code civil se prescrit dans un délai de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l'identité du producteur.

Selon l'article 1245-3, alinéa 2, du même code, un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre.

Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit.

Par suite, le délai de prescription a couru à l'encontre de victimes de la Dépakine à compter de la date à laquelle ils ont su ou auraient dû savoir qu'ils n'avaient pas bénéficié de l'information selon laquelle la Dépakine prescrite pouvait produire des effets tératogène.

OBLIGATION DE PRECONISATION ET D'INFORMATION DU VENDEUR

Il incombe au vendeur [professionnel] de démontrer qu'il s'est acquitté de l'obligation de s'enquérir des besoins de l'acheteur et de l'informer de l'aptitude du matériel proposé à l'emploi qui en était prévu.

VICE CACHE ET POINT DE DEPART DE LA PRESCRIPTION COMMERCIALE

Le point de départ du délai de la prescription extinctive prévu à l'article L. 110-4 du code de commerce, modifié par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, court à compter de la vente initiale, intervenue le 18 mars 2008, de sorte que l'action fondée sur la garantie des vices cachés, engagée les 9 et 10 février 2016, était manifestement irrecevable, l'action récursoire contre le fabricant ne pouvant offrir à l'acquéreur final plus de droits que ceux détenus par le vendeur intermédiaire.

l'action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, est aussi enfermée dans le délai de prescription prévu par l'article L. 110-4 du code de commerce, qui court à compter de la vente initiale, ce qui interdit de déclarer recevables des demandes en garantie dirigées contre les fournisseurs des marchandises litigieuses.

De la même façon, le point de départ du délai de prescription de l'article L. 110-4, I, du code de commerce auquel était soumise l'action contractuelle directe d'un Maître d'ouvrage contre un des fournisseurs de son entrepreneur, fondée sur la non-conformité de matériaux, doit être fixé à la date de leur livraison à cet entrepreneur.

Rappelons qu'en matière de vente "civile", l'article 2224 du Code Civil devrait normalement faire courir le délai de prescription de 5 ans à compter du moment où le titulaire de l’action a été en mesure d’agir, cette durée ne pouvant être plus longue que 20 ans courant à compter de la naissance du droit. (Art. 2232 du Code Civil).

Toutefois, l'article 1646 du Code Civil soumet également l'acheteur au bref délai de 2 ans à compter de la découverte du vice pour agir.

Le bref délai de l'action récursoire fondée sur la garantie des vices cachés, exercée par le vendeur intermédiaire ou l'entrepreneur à l'encontre de son fournisseur, ne court pas à compter du jour de la révélation du vice à l'acquéreur, mais de la date où l'intermédiaire ou l'entrepreneur est lui-même assigné ou, en l'absence d'assignation, à la date où le paiement d'une somme d'argent lui est réclamé

En matière de responsabilité du fait des produits défectueux, l'article 1245-15 fait courir une prescription de 10 ans à compter de la mise en circulation du produit.

Selon l'article 1245-16, le demandeur dispose alors d'un délai de 3 ans pour agir à compter de la date à laquelle il a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l'identité du producteur.

Rappelons qu'aux termes de l'Article 2254 du Code Civil, la durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des parties. Elle ne peut toutefois être réduite à moins d'un an ni étendue à plus de dix ans.

Les parties peuvent également, d'un commun accord, ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de la prescription prévues par la loi.

Les deux dispositions précédentes ne sont cependant pas applicables :

  • aux actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts.
  • selon l'article L 218-1 du Code de la Consommation, et par dérogation à l'article 2254 du code civil, au contrat passé entre un professionnel et un consommateur qui ne peuvent, même d'un commun accord, ni modifier la durée de la prescription, ni ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de celle-ci. Il s'agit d'une règle d'ordre public.

CLAUSE LIMITATIVE DE RESPONSABILITE ET RESOLUTION DU CONTRAT POUR INEXECUTION

En cas de résolution d’un contrat pour inexécution, les clauses limitatives de réparation des conséquences de cette inexécution demeurent applicables.

Cass. Com., 7 février 2018, 16-20352, publié au Bulletin ; D. 2018, p. 537, obs. D.Mazeaud , JCP G 2018, n° 15, 415 et 416, avis Le Mesle L. et note Leveneur-Azémar M., RLDC 2018/160, n° 6448, note A.Tadros - Mais la clause est également nulle si le cas le contrat est frappé de nullité. Cf. Solution identique en matière de clause pénale : Cass. Civ. III, 15 février 2005, 04-11223.

CONDITION DE VALIDITE D'UNE CLAUSE DE NON-GARANTIE DES VICES CACHES

Les clauses limitatives de responsabilité en matière de vente ne sont valables qu'entre "professionnels de même spécialité", c'est à dire disposant de compétences similaires pour apprécier le vice.

Une clause de non-garantie des vices cachés stipulée entre deux bateliers, professionnels de la navigation fluviale, de la même spécialité, et les vices cachés étant indécelables tant pour l'acquéreur que pour le vendeur, à égalité au regard de leur aptitude à découvrir les vices affectant le bateau, doit recevoir application.

Cass. Civ. I, 10 octobre 2019, 18-19463 ; LEDC déc. 2019, p. 7, note Gaëtan Guerlin

CIRCULATION

ABSENCE DE FAUTE INEXCUSABLE DU CYCLISTE

Ne caractérise pas l'existence d'une faute inexcusable cause exclusive de l'accident de nature à exclure leur droit à indemnisation les conséquences dommageables de celui-ci, la faute commise par des cyclistes qui ont volontairement de nuit décidé d'emprunter la route départementale au lieu de la piste cyclable pour rentrer plus vite alors qu'ils circulaient sur des bicyclettes dépourvues de tout éclairage et sans aucun équipement lumineux ou réfléchissant, que par ailleurs ils connaissaient les lieux et que compte tenu de leur âge au moment de l'accident, 17 ans et 16 ans, ils avaient conscience du danger.

Cass. Civ. II, 28 mars 2019, 18-14.125 18-15.855, Publié au bulletin ;bjda.fr 2019, n° 63, note R. Bigot : "L'introuvable faute inexcusable du cycliste"

FAUTE INEXCUSABLE DU PIETON

Ayant relevé que C... J..., qui se tenait debout à côté de sa voiture, stationnée en bon état de marche, sur un refuge où il se trouvait en sécurité, s'est, sans raison valable connue, soudainement engagé à pied sur la chaussée de l'autoroute, à la sortie d'une courbe masquant la visibilité pour les véhicules arrivant sur les voies, devant un ensemble routier circulant sur la voie de droite à la vitesse autorisée, qui n'a pas disposé d'une distance suffisante pour l'éviter, la cour d'appel a pu en déduire qu'était caractérisée la faute inexcusable de la victime et que cette faute était la cause exclusive de son dommage.

Cass. Civ. II, 28 mars 2019, 18-15168 (Il semble que les juges aient eu un doute sérieux sur le caractère "involontaire" de l'accident de la part de la victime...)

NOTION D'ACCIDENT DE LA CIRCULATION :

  • INCENDIE D'UN VEHICULE EN STATIONNEMENT
  • Le stationnement et la période d’immobilisation du véhicule sont des étapes naturelles et nécessaires qui font partie intégrante de l’utilisation de celui-ci en tant que moyen de transport. Ainsi, un véhicule est utilisé conformément à sa fonction de moyen de transport lorsqu’il se déplace, mais, en principe, également durant son stationnement entre deux déplacements.

    Le stationnement d’un véhicule dans un garage privé constitue une utilisation de celui-ci qui est conforme à sa fonction de moyen de transport, qu'elle qu'en soit la durée.

    Le fait que les dommages résultent d’un incendie causé par la défaillance du circuit électrique dudit véhicule en stationnement, n'exclut pas qu'il constitue un accident de la circulation au sens de l'article 3, 1er alinéa, de la directive 2009/103, et relève donc de la loi Badinter.

    CJUE, 20 juin 2019, C-100-18, Línea Directa Aseguradora SA ; RGDA oct. 2019, n° 116v7, p. 16,note J.Landel : "L'incendie provoqué par le circuit électrique d'un véhicule stationné dans le garage privé d'un immeuble relève de la notion de « circulation des véhicules »" - D'où la nécessité de la souscription d'une garantie d'assurance automobile pour garantir la responsabilité civile découlant du stationnement d'un véhicule, même dans un garage privé et pour une longue durée...

  • PIETON QUI SE BLESSE EN RELEVANT UN SCOOTER RENVERSE
  • Est victime d'un accident de la circulation au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, la victime qui se blesse en relevant un scooter à terre.

    Cass. Civ. II, 24 octobre 2019, 18-20910, Publié au bulletin ; BJDA, Novembre et Décembre 2019, note A. CAYOL :"De la notion d’accident de la circulation"; Gaz. Pal. 26 nov. 2019, p. 17, note Marc Dupré ; RGDA déc. 2019, p. 27, note James Landel ; RC et Ass. n° 12, Décembre 2019, comm. 295, note Sophie Hocquet-Berg ; J.Traullé : "Qu'est-ce-qu'un accident, aui sens de la loi Badinter ?", GP 14.01.2020, p.34

    EXONERATION DE LA RESPONSABILITE DE LA SNCF EN CAS DE FAUTE DU VOYAGEUR

    Selon une jurisprudence constante, rendue au visa de l'ancien article 1147 du Code Civil (actuel 1231-1), le transporteur ferroviaire, tenu envers les voyageurs d'une obligation de sécurité de résultat, ne peut s'exonérer de sa responsabilité contractuelle en invoquant la faute d'imprudence de la victime que si cette faute, quelle qu'en soit la gravité, présente les caractères de la force majeure : (Cass. Civ. I, 13 mars 2008, 05-12551, Bull. 2008, I, n° 76 ; Ch. mixte, 28 novembre 2008, 06-12307, Bull. 2008, I, n° 3).

    Toutefois, il résulte de l'article 11 du règlement CE n° 1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 que, sans préjudice du droit national octroyant aux voyageurs une plus grande indemnisation pour les dommages subis, la responsabilité des entreprises ferroviaires relative aux voyageurs et à leurs bagages est régie par le titre IV, chapitres I, III et IV, ainsi que les titres VI et VII de l'annexe I du règlement n° 1371/2007.

    Selon l'article L. 2151-1 du code des transports,le règlement (CE) n° 1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires s'applique aux voyages et services ferroviaires pour lesquels une entreprise doit avoir obtenu une licence conformément à la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen (refonte).

    Selon l'article 26 de l'annexe I du Réglement, le transporteur est responsable du dommage résultant de la mort, des blessures ou de toute autre atteinte à l'intégrité physique ou psychique du voyageur causé par un accident en relation avec l'exploitation ferroviaire survenu pendant que le voyageur séjourne dans les véhicules ferroviaires, qu'il y entre ou qu'il en sorte et quelle que soit l'infrastructure ferroviaire utilisée. Il est déchargé de cette responsabilité dans la mesure où l'accident est dû à une faute du voyageur.

    Il en résulte que le transporteur ferroviaire peut s'exonérer de sa responsabilité envers le voyageur lorsque l'accident est dû à une faute de celui-ci, sans préjudice de l'application du droit national en ce qu'il accorde une indemnisation plus favorable des chefs de préjudices subis par la victime.

    Cass. Civ. I, 11 décembre 2019, 18-13840 ; LEDC janvier 202, p.7, note M.Latina ; RDC juin 2020, p. 26, note Marie Dugué -

    Conformément à l’article L. 2111-9 du Code des transports, l’établissement public SNCF Réseau a la qualité d’établissement public national à caractère industriel et commercial et est le gestionnaire du réseau ferré national. La voie ferrée et ses dépendances ont le caractère d’ouvrages publics. Si les actions en responsabilité dirigées contre l’exploitant d’un service public en raison des dommages causés aux tiers par les ouvrages publics qui concourent à son activité ressortissent à la juridiction administrative, la juridiction judiciaire a seule compétence pour connaître des dommages causés à l’usager d’un service public industriel et commercial à l’occasion de la fourniture de la prestation due par le service à son égard, peu important que la cause des dommages réside dans un vice de conception, dans l’exécution de travaux publics ou dans l’entretien ou le fonctionnement d’un ouvrage public.

    RESPONSABILITE DE L'AVOCAT

  • DEFAUT D'INFORMATION SUR LES RISQUES DE LA PROCEDURE
  • Conformément à l'article 1353, alinéa 2, du code civil, il incombe à l'avocat, tenu d'une obligation particulière d'information et de conseil à l'égard de son client, de rapporter la preuve qu'il a exécuté cette obligation.

    Il lui appartient donc d'établir avoir informé leur client sur les risques d'une procédure et sur l'opportunité d'exercer un recours contre les décisions rendues à l'encontre de celui-ci.

    Cass. Civ. 1, 04 juillet 2019, 18-17057 - Cette décision illustre, une fois de plus, la nécessité ppur l'avocat d'établir une "consultation écrite" attirant l'attention de son client sur les chances et les risques d'une procédure, et insistant sur l'aléa judiciaire. - Rappelons également que la méconnaissance du RIN peut constituer une faute civile : Cass. Civ. I, 24 octobre 2019, n° 18-23858.

  • CONDITION DE LA RESPONSABILITE POUR ABSENCE DE PRISE DE MESURE CONSERVATOIRE
  • L'avocat ne peut être déclaré responsable d'un défaut de prise de mesure conservatoire à l'encontre de son adversaire que s'il existe des circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance de son client.

    Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 septembre 2019, 18-20526 - Il n'en reste pas moins qu'en vertu de son devoir de prudence, l'avocat devra toujours s'inquiéter de la solvabilité d'un adversaire...

  • APPRECIATION DU PREJUDICE EN PERTE DE CHANCE
  • Afin d'évaluer la chance perdue, il appartient au Juge de "procéder à une reconstitution fictive du procès manqué par la faute de l'avocat".

    Cass. Civ. I, 04 juillet 2019, 18-20686 (Défaut de saisine de la CEDH en matière fiscale)

  • PRESCRIPTION DE L'ACTION EN RESPONSABILITE CONTRE L'AVOCAT
  • La prescription de l'article 2225 du Code civil, selon laquelle l'action en responsabilité dirigée contre les personnes ayant représenté ou assisté les parties en justice, y compris à raison de la perte ou de la destruction des pièces qui leur ont été confiées, se prescrit par cinq ans à compter de la fin de leur mission, ne s'étend pas aux autres missions de l'avocat, et notamment à ses activités de conseil ou de rédaction d'acte qui restent soumises à la prescription de droit commun de cinq ans de l'article 2224 du Code Civil, laquelle ne commence à courir qu'à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

    Cass. Civ. I, 04 juillet 2019, 18-19722 et suivants - Il en résulte que l'assurance des Barreaux étant en principe conclue en "base réclamation", l'avocat qui a quitté le Barreau et n'a pas resouscrit de police d'assurance n'est pas assuré si la manifestation du dommage causé par sa faute et la réclamation de son client interviennent postérieurement à la période de garantie subséquente de 10 ans...

    CONSTRUCTION : ETENDUE DE LA RESPONSABILITE DE L'ARCHITECTE CHARGE DE L'ETABLISSEMENT DU PERMIS DE CONSTRUIRE

    Un architecte, auteur du projet architectural et chargé d'établir les documents du permis de construire, doit proposer un projet réalisable tenant compte des contraintes du sol, et engage donc sa responsabilité décennale dès lors qu'il est constaté que la mauvaise qualité des remblais, mis en oeuvre avant son intervention, était la cause exclusive des désordres compromettant la solidité de l'ouvrage.

    Il en est de même de l'entreprise dont la mission consiste en une étude des fondations de l'immeuble et qui ne peut pas invoquer à son profit une quelconque cause d'exonération de sa responsabilité.

    Cass. Civ. III, 21 novembre 2019, 16-23509 ; Gaz. Pal. 17 déc. 2019, p. 38, note Catherine Berlaud



    ASSURANCES



    FAUTE INTENTIONNELLE : DEFAUT D'ENTRETIEN RENDANT INELUCTABLE LA REALISATION DU DOMMAGE, FAUTE D'ALEA

    Ayant relevé que les expertises diligentées avant et après un effondrement avaient constaté la gravité des désordres affectant la grange en sa partie appartenant à l'assuré et qu'en dépit de cette gravité apparente et de trois lettres de mise en garde qui lui avaient été précédemment adressées pour attirer son attention sur l'urgence de faire procéder à des réparations, cet assuré, qui ne pouvait ignorer qu'en l'absence de travaux de consolidation, la couverture de sa partie de grange assurée était vouée à un effondrement certain à brève échéance, était demeuré sans réaction, sa persistance dans sa décision de ne pas entretenir la couverture de son immeuble manifestait son choix délibéré d'attendre l'effondrement de celle-ci, un tel choix, qui avait pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, constituait une faute dolosive excluant la garantie de l'assureur.

    Cass. Civ. II, 25 octobre 2018, 16-23103, Publié au bulletin ; RDC 2019, 115u3, p. 42, note S.Pellet ; Gaz. Pal. 29 oct. 2019, p. 50, note B.Cerveau

    EXCLUSION DE RISQUE INSUFFISAMMENT LIMITEE : ETHYLISME

    Les clauses excluant la garantie de l'assureur doivent être formelles et limitées comme se référant à des critères suffisamment précis permettant à l'assuré de connaître l'étendue exacte de la garantie.

    La clause excluant de la garantie « les suites et les conséquences des affections liées à l'éthylisme » sans autre précision, doit être déclarée nulle, comme insuffisamment limitée, conformément à l'article L 113-1 du Code des Assurances.

    Rappel : Pour être suffisamment limitée l’exclusion doit avoir un contenu parfaitement déterminé et ne doit pas priver le contrat de son objet.

    Cass. Civ. II, 13 juin 2019, 18-18267 ; RGDA juillet 2019, p. 29, note A.Pimbert

    EXCLUSION DE RISQUE INSUFFISAMMENT FORMELLE

    Il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances que l'assureur doit répondre des conséquences des fautes de l'assuré, sauf clause d'exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

    Une clause d'unepolioce de responsabilité civile professionnelle qui exclut « les frais exposés pour le remplacement, la remise en état ou le remboursement des biens que vous avez fournis, et/ou pour la reprise des travaux exécutés par vos soins, ainsi que les frais de dépose et repose et les dommages immatériels qui en découlent », est susceptible d'interprétation et doit donc être déclarée nulle comme dépourvu de caractère "formel".

    Cass. Civ. III, 13 juin 2019, 18-14.817, Inédit

    EXCLUSION DE RISQUE : PREUVE DU CARACTERE FORMEL ET LIMITE A LA CHARGE DE L'ASSUREUR

    Une Police d'assurance d'une société de conseil en gestion du patrimoine, comporte une clause d'exclusion de garantie aux termes de laquelle sont exclues « toutes activités de préconisation ou de commercialisation de produits mobiliers ou immobiliers sous le régime du bénéfice des lois de défiscalisation ».

    Il incombe à l'assureur invoquant une telle exclusion de garantie, laquelle doit être formelle et limitée, de démontrer que les conditions de celle-ci sont réunies.

    En l'espèce l'assureur ne précisant pas de quelle loi de défiscalisation serait spécifiquement bénéficiaire le placement de la cliente conseillée par l'assurée, il ne rapporte pas la preuve qui lui incombait et l'application de la clause d'exclusion de garantie invoquée par l'assureur doit être écartée.

    Cass. Civ. II, 23 mai 2019, 18-15568 ; RGDA juillet 2019, p. 38, note A.Pélissier

    Le Juge ne peut faire application d'office d'une clause d'exclusion de garantie qui n'est pas invoquée par un assureur, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur la mise en oeuvre de cette clause, dans la mesure où elle n'était pas dans le débat.

    Cass. Civ. II, 13 juin 2019, 18-19778 ; RGDA juillet 2019, p. 52, R. Schulz,

    CESSION DU FONDS DE COMMERCE ET TRANSMISSION DU CONTRAT D'ASSURANCE

    Selon l’article L. 121-10 du code des assurances, en cas de décès de l'assuré ou d'aliénation de la chose assurée, l'assurance continue de plein droit au profit de l'héritier ou de l'acquéreur, à charge par celui-ci d'exécuter toutes les obligations dont l'assuré était tenu vis-à-vis de l'assureur en vertu du contrat.

    Cette disposition impérative, qui ne distingue pas selon que le transfert de propriété, porte sur un bien mobilier ou immobilier, corporel ou incorporel ni selon le mode d’aliénation de la chose assurée, s’applique en cas de cession d’un fonds de commerce ordonnée lors d’une procédure de redressement judiciaire.

    Cass. Civ. II, 24 octobre 2019, 18-15.994, Publié au bulletin ; Bjda.fr, 2019, n° 66, M. Asselain, "Conditions de la transmission de l’assurance à l’acquéreur de la chose assurée" ; SJ, G, 2019, 1367, note Jean-Michel do Carmo Silva

    IMPRESCRIPTIBILITE DE LA DEMANDE TENDANT A VOIR REPUTER NON ECRITE UNE CLAUSE ABUSIVE

    La demande tendant à voir réputer non écrites les clauses abusives litigieuses d'un contrat d'assurance ne s'analysant pas en une demande en nullité, elle n'est pas soumise à la prescription quinquennale courant à compter du jour où le consommateur a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer.

    Cass. Civ. I, 13 mars 2019, 17-23169, Publié au bulletin ; RGDA juin 2019, p. 22, A. Pélissier

    Aux termes de l'article L 241-1 du Code de la Consommation, de telles clauses abusives sont réputées "non écrites". Toutefois, quelle est la portée de cette sanction ? C'est toute la clause qui doit être annulée, et non seulement la seule partie illicite.

    Par Arrêt en date du 26 mars 2019, la de la CJUE a jugé que les articles 6 et 7 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doivent être interprétés en ce sens que, d’une part, ils s’opposent à ce que la clause d'un contrat jugée abusive soit maintenue en partie, moyennant la suppression des éléments qui la rendent abusive, lorsqu’une telle suppression reviendrait à réviser le contenu de ladite clause en affectant sa substance, et que, d’autre part, ces mêmes articles ne s’opposent pas à ce que le juge national remédie à la nullité d’une telle clause abusive en y substituant la nouvelle rédaction de la disposition législative qui a inspiré cette clause, applicable en cas d’accord des parties au contrat, pour autant que le contrat en cause ne puisse subsister en cas de suppression de ladite clause abusive, et que l’annulation du contrat dans son ensemble expose le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables.

    CJUE, Grande Chb., 26 mars 2019, C‑70/17 et C‑179/17 ; LEDC juillet 2019, p. 4, note G.Cattalano

    En effet, selon une jurisprudence constante, le système de protection mis en œuvre par la directive 93/13 repose sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d’information, situation qui le conduit à adhérer aux conditions rédigées préalablement par le professionnel, sans pouvoir exercer une influence sur le contenu de celles-ci.2010:309.

    Eu égard à une telle situation d’infériorité, la directive 93/13 oblige les États membres à prévoir un mécanisme assurant que toute clause contractuelle n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle puisse être contrôlée afin d’apprécier son caractère éventuellement abusif. Dans ce cadre, il incombe au juge national de déterminer, en tenant compte des critères énoncés à l’article 3, paragraphe 1, et à l’article 5 de la directive 93/13, si, eu égard aux circonstances propres au cas d’espèce, une telle clause satisfait aux exigences de bonne foi, d’équilibre et de transparence posées par cette directive.

    Il y a d’abord lieu de rappeler que, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, il incombe aux juridictions de renvoi d’écarter l’application des clauses abusives afin qu’elles ne produisent pas d’effets contraignants à l’égard du consommateur, sauf si le consommateur s’y oppose.

    Ensuite, lorsque le juge national constate la nullité d’une clause abusive dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une règle de droit national qui permet au juge national de compléter ce contrat en révisant le contenu de cette clause.

    Enfin, la clause ayant pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement du professionnel à l'une des ses obligations est présumée abusive de manière irréfragable, même si elle a été fixée par le consommateur lui-même : Cass. Civ. I, 11 décembre 2019, 18-21164 ; SJ,G, 2019, n° 52, 1373 ; Voir également : M.Behar-Touchais : "Le nouveau déséquilibre significatif" RDC 2019, n°4, p.37, p.39

    POINT DE DEPART DE LA PRESCRIPTION BIENNALE

    Conformément à l'article L 114-1 du code des assurances, quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier.

    ass. Civ. II, 23 mai 2019, 18-16528 ; LEDC juillet 2019, p. 6, note G.Guerlin

    INOPPOSABILITE DE LA PRESCRIPTION BIENNALE ET IMPRESCRIPTIBILITE

    L'assureur qui, n'ayant pas respecté les dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances, ne peut pas opposer la prescription biennale à son assuré et ne peut pas prétendre à l'application de la prescription de droit commun.

    Cass. Civ. III, 21 mars 2019, 17-28.021, Publié au bulletin ; bjda.fr 2019 n°63, note L. Lefebvre et S. Bauhardt ; RGDA juin 2019, p. 27, note A. Pélissier ; L'Argus de l'assurance, n°7618, p.34, note C.Taillepied ; LEDC juin 2019, p. 5, note Sophie Pellet ; RC et Ass. 2019, Juin 2019, p.30, note H.groutel

    INDEMNISATION DU DOMMAGE : Valeur de remplacement

    En l'absence de toute stipulation contractuelle définissant la méthode d'évaluation du bien sinistré, le Juge peut, sans méconnaître le principe indemnitaire, souverainement apprécier au jour du sinistre la valeur du bien endommagé et retenir sa valeur de remplacement.

    Cass. Civ. II, 29 août 2019, 18-18792 ; LEDA, Octobre 2019,p 2 : Note Axelle Astegiano-La Rizza : "Le juge et l'appréciation de la valeur de la chose assurée en l'absence de stipulation contractuelle"

    ETENDUE DE L'OBLIGATION D'AFFECTATION DE L'INDEMNITE D'ASSURANCE DE DOMMAGE

    Il résulte de l'alinéa 1 de l'article L. 121-17 du code des assurances issu de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement,que, sauf dans le cas visé à l'article L. 121-16, les indemnités versées en réparation d'un dommage causé à un immeuble bâti doivent être utilisées pour la remise en état effective de cet immeuble ou pour la remise en état de son terrain d'assiette, d'une manière compatible avec l'environnement de cet immeuble.

    Toute clause contraire est atteinte d'une nullité d'ordre public.

    En son troisième alinéa, l'article précité qu'un arrêté du maire prescrit les mesures de remise en état susmentionnées, dans un délai de deux mois suivant la notification du sinistre au maire par l'assureur ou l'assuré.

    Il ressort des travaux préparatoires et de l'insertion de ces dispositions dans le Titre II du Livre premier du code des assurances que le législateur a entendu les rendre applicables à l'ensemble des assurances de dommages.

    Les termes mêmes de l'article susvisé conduisent à retenir que l'étendue de l'obligation d'affectation des indemnités d'assurance édictée par le premier alinéa est limitée au montant de ces indemnités nécessaire à la réalisation des mesures de remises en état prescrites, conformément au troisième, par un arrêté du maire.

    Dès lors, l'indemnité immédiate ne doit être affectée à la reconstruction de l'immeuble que dans la mesure où la remise en état est définie par un arrêté du maire intervenu dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article susvisé.

    Cass. Civ. II, 18 avril 2019, 18-13371, Publié au bulletin ; Astegiano-La Rizza, L’article L. 113-17 du Code des assurances et l’affectation de l’indemnité, bjda.fr 2019, n° 63 ; RGDA juillet 2019, p. 18, note J.Kullmann ; Gaz. Pal. 18 juin 2019, p. 64, note R.Bigot

    ASSURANCE CONSTRUCTION

    Dès lors qu'une attestation d'assurance stipule que la responsabilité civile de l'assuré était couverte dans le cas où elle serait recherchée en qualité de sous-traitant vis-à-vis du locateur d'ouvrage titulaire du marché ou d'un autre sous-traitant, dans les conditions et limites posées par les articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 2270-2 du code civil et les textes légaux ou réglementaires pris pour leur application, il en résulte que la responsabilité de l'assuré, en sa qualité de sous-traitant, qui était de nature contractuelle, est garantie par l'assureur.

    Cass. Civ. III, 23 mai 2019, 18-13.837, Inédit ; RGDA juill. 2019, n° 116s3, p. 26, note JP Karila

    Clause d'exclusion des règles de l'art insuffisamment formelle et limitée

    La clause d'exclusion visant les dommages résultant d'une méconnaissance intentionnelle, délibérée ou inexcusable des règles de l'art et normes techniques applicables dans le secteur d'activité de l'assuré est insuffisamment formelle et limitée au sens de l'article L 131-1 du Code des Assurances, comme ne permettant pas à l'assuré de déterminer avec précision l'étendue de l'exclusion en l'absence de définition contractuelle de ces règles et normes et du caractère volontaire ou inexcusable de leur inobservation.

    Cass. Civ. III, 19 septembre 2019, 18-19616, Publié au bulletin ;bjda.fr 2019, n° 65 : S. Abravanel-Joly : "Pour l’application de la conception subjective de la clause d’exclusion des règles de l’art à tout professionnel qualifié" ; RGDA déc. 2019, p. 21, note Anne Pélissier,



    PROCEDURE


    CLAUSE D'EXCLUSION DE RISQUE ET RESPECT DU CONTRADICTOIRE

    Conformément l'article 16 du CPC, le Juge ne peut faire application d'office d'une clause d'exclusion de garantie qui n'est pas invoquée par l'assureur, et sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur la mise en oeuvre de cette clause, dès lors qu'elle n'est pas dans le débat.

    Cass. Civ. II, 13 juin 2019, 18-19778

    ACTION DIRECTE DE LA VICTIME

  • NOTION
  • La demande d'une victime tendant à ce que l'assureur du responsable de son dommage soit condamné à lui verser l'indemnité due par ce dernier ne peut s'analyser que comme l'exercice du droit d'action directe prévu par l'article L 124-3 du Code Civil, même si la demande du tiers lésé tend à ce que le responsable soit relevé et garanti par son assureur des condamnations pouvant être prononcées à son encontre.

    Cass. 2e civ., 28 mars 2019, no 18-14864 ; bjda.fr 2019, n° 63, obs. Ph. Casson ; RGDA juin 2019, p. 19, R.Schulz

  • MARCHE PUBLIC : LA JURIDICTION JUDICIAIRE DOIT SURSEOIR A STATUER SUR L'ACTION DIRECTE
  • Selon l’article L. 124-3 du code des assurances, un assureur de responsabilité ne peut être tenu d’indemniser le préjudice causé à un tiers par la faute de son assuré que dans la mesure où ce tiers peut se prévaloir, contre l’assuré, d’une créance née de la responsabilité de celui-ci.

    Il n’entre pas dans les pouvoirs du juge judiciaire, saisi de l’action directe de la victime contre l’assureur de l’auteur du dommage, de se prononcer sur la responsabilité de l’assuré lorsque celle-ci relève de la compétence de la juridiction administrative (1re Civ., 3 novembre 2004, pourvoi n° 03-11.210, Bull., 2004, I, n° 250 ; 1re Civ., 23 juin 2010, pourvoi n° 09-14.592, Bull. 2010, I, n° 149) ;

    A défaut de reconnaissance, par les assureurs, de la responsabilité de leurs assurés, il appartient au Juge Judiciaire de surseoir à statuer sur l'ation directe de la victime contre l'assureur de responsabilité jusqu’à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la responsabilité découlant de l'inexécution d'un marché public.

    Cass. Civ. I, 11 Décembre 2019 – n° 18-25441 ; SJ, G, 2019, 1379

    La juridiction administrative reste cependant compétente pour statuer sur l'action directe contre l'assureur, à condition que le contrat d'assurance garantissant le responsable ait été passé selon la procédure des marchés publics.

    Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 31/03/2010, 333627, Publié au recueil Lebon

  • CLAUSE COMPROMISSOIRE DU CONTRAT D'ASSURANCE OPPOSABLE AU TIERS EXERCANT L'ACTION DIRECTE
  • Selon le principe compétence - compétence, il appartient à l'arbitre de statuer, par priorité, sur sa propre compétence, sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la clause d' arbitrage.

    Ayant constaté que le contrat souscrit par la société SC Navi SRL stipulait que les litiges concernés par le contrat d'assurance devaient être portés, à l'exclusion des juridictions ordinaires, devant une juridiction d'arbitrage de Hambourg et réglés selon les règlements de la German Maritime Arbitrators Association, la cour d'appel, qui a retenu que la clause compromissoire n'était pas manifestement inapplicable dès lors qu'accessoire du droit d'action, elle était opposable aux victimes exerçant l'action directe contre les assureurs, a exactement décidé que le tribunal de commerce de Nancy était incompétent.

    Cass. Civ. I, 19 décembre 2018, 17-28951 ; Malik Laazouzi : "L'éviction du for de l'action directe de la victime au profit de l'arbitrage international prévu par le contrat d'assurance ?", RDC 2019, n° 116j8, p. 69.

    Toutefois, la Cour de Cassation ne va pas jusqu'à valider expressément que la convention d’arbitrage est applicable à l’action directe en tant qu’accessoire du droit de la victime, la mission de la Cour d'appel étant limitée à l'appréciation du caractère "manifeste" de l'inapplicabilité de la clause , la question de son applicabilité étant laissée au tribunal arbitral lui-même...

    EXPERTISE JUDICIAIRE

  • FORCE PROBANTE D'UN RAPPORT D'EXPERTISE NON CONTRADICTOIRE
  • Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

    Le Juge ne peut écarter la force probante d'un rapport d'expertise établi non contradictoirement à la demande d'un assuré en retenant que si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande d'une partie, alors qu'a également été versé aux débats un rapport du propre expert mandaté par l'assureur.

    Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 mai 2019, 18-16262; RGDA juillet 2019, p. 54, R.Schulz

  • NULLITE DU RAPPORT D'EXPERTISE JUDICIAIRE POUR NON TRANSMISSION DU PRE-RAPPORT A UNE PARTIE
  • Le fait qu'un expert judiciaire ne communique pas de manière effective son pré-rapport à l'une des parties, ainsi privée de la faculté de lui adresser un Dire [sur son préjudice], est susceptible de constituer un grief de nature à entraîner la nullité du rapport d'expertise et de la décision fondée sur ce rapport , faute de la motivation exigée par l'article 455 du CPC.

    Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 3 octobre 2019, 18-19.981

    PRINCIPE DE CONCENTRATION DES MOYENS

    Conformément au principe d'autorité de chose jugée de l'article 1351, devenu 1355, du code civil, il incombe au demandeur, avant qu'il ne soit statué sur sa demande, d'exposer l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci. Il s'ensuit que, dans une même instance, une prétention rejetée ne peut être présentée à nouveau sur un autre fondement.

    Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 11 avril 2019, 17-31785, Publié au bulletin -Arrêt de principe : Cour de Cassation, Assemblée plénière, du 7 juillet 2006, 04-10672 (Césareo) - Cour de cassation, Cass. civ. I, 5 juillet 2017, 16-20233

    Toutefois, s'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits.

    Cass. civ.II, 22 mars 2018, 17-14.302 ; LEDC juin 2019, p. 6, note G.Guerlin

    DEMANDE DE DEFERENCEMENT SUR UN MOTEUR DE RECHERCHE : QUESTIONS PREJUDICIELLES

    Conformément à l'article 9 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 les traitements de données à caractère personnel relatives aux infractions, condamnations et mesures de sûreté ne peuvent être mis en oeuvre que par les juridictions, les autorités publiques et les personnes morales gérant un service public, agissant dans le cadre de leurs attributions légales, les auxiliaires de justice, pour les stricts besoins de l'exercice des missions qui leur sont confiées par la loi, et les personnes morales mentionnées aux articles L. 321-1 et L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle, agissant au titre des droits dont elles assurent la gestion ou pour le compte des victimes d'atteintes aux droits prévus aux livres Ier, II et III du même code aux fins d'assurer la défense de ces droits.

    Saisi de quatre requêtes portant, notamment, sur le droit au déréférencement de telles données, le Conseil d'Etat a, par décision du 24 février 2017 (n° 391000, 393769, 399999 et 401258), renvoyé à la Cour de justice de l'Union européenne quatre questions préjudicielles.

    Il y a lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision qui sera rendue.

    Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 5 juin 2019, 18-14.675, Publié au bulletin

    APPEL SUR LA COMPETENCE : REPRESENTATION OBLIGATOIRE ET RESPECT DE LA PROCEDURE A JOUR FIXE

    Il résulte des articles 83, 84 et 85 du code de procédure civile que, nonobstant toute disposition contraire, l'appel dirigé contre la décision de toute juridiction du premier degré se prononçant sur la compétence sans statuer sur le fond du litige relève, lorsque les parties sont tenues de constituer un avocat, de la procédure à jour fixe et qu'en ce cas l'appelant doit saisir, dans le délai d'appel et à peine de caducité de la déclaration d'appel, le premier président de la cour d'appel en vue d'être autorisé à assigner l'intimé à jour fixe.

    ...ayant relevé que par le jugement frappé d'appel le juge de l'exécution s'était déclaré incompétent pour connaître de la demande de la société Artimédia et que celle-ci n'avait pas saisi le premier président afin d'être autorisée à assigner à jour fixe, c'est à bon droit que la cour d'appel, tenue de vérifier la régularité de sa saisine, en a déduit que la déclaration d'appel était caduque.

    Cass. Civ. II, 11 juillet 2019, 18-23617 - Cass. Civ. II, avis, 11 juillet 2019, 19-70012

    PRESCRIPTION CIVILE

    Il résulte de l'article 2241, alinéa 2, du code civil que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt le délai de prescription.

    Cette disposition applicable, notamment, en cas d'annulation de la signification d'une assignation délivrée par procès-verbal de recherches infructueuses, ainsi que le jugement subséquent.

    Cass. Com., 26 juin 2019, 18-16859, Publié au bulletin

    Cour de cassation du 7 février 2018, « en cas de résolution d’un contrat pour inexécution, les clauses limitatives de réparation des conséquences de cette inexécution demeurent applicables » (Cass. com., 7 févr. 2018, n° 16-20.352, publié au Bulletin, D. 2018, p. 537, obs. Mazeaud D., JCP G 2018, n° 15, 415 et 416, avis Le Mesle L. et note Leveneur-Azémar M., RLDC 2018/160, n° 6448, note Tadros A.). En revanche, tel n’est pas le cas si le contrat est nul. Dans cette hypothèse, la clause ne survit pas.



    LEGISLATION



    REFORME DU REGIME DE LA RESPONSABILITE DU FAIT DE "CLAUSE ABUSIVE" EN MATIERE COMMERCIALE ET PRESCRIPTION

    L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 a réformé le régime en matière commerciale dans l’article L 442-1, I, 2° du Code de commerce, qui remplace l’ancien article L. 442-6, I, 2° pour les contrats conclus ou renouvelés à compter du 26 avril 2019.

    Désormais, l’auteur de la clause abusive vise toutes les personnes qui exercent "des activités de production, de distribution ou de services".

    La victime de la clause n’est plus seulement un "partenaire commercial" mais, plus également toute "partie au contrat", y compris un client consommateur.

    Tous les stades de la vie contractuelle sont désormais visés, y compris la période précontractuelle.

    Enfin, seule la victime peut solliciter la nullité de la clause.

    Il existe donc une différence de sanction entre, d’une part, les Codes civil et de la consommation, où la "clause abusive" est réputée "non écrite" et, d’autre part, le Code de commerce, institue à présent expressément la responsabilité du fait d'une "clause abusive", sanction qui, elle, est soumise à la prescription.

    Voir M.Latina : "La modification des dispositions du Code de commerce relatives aux clauses abusives", LEDC juin 2019, p.1 ; Martine Behar-Touchais : "Le nouveau déséquilibre significatif", RDC 2019, n° 116j1, p. 37 et "La mise en œuvre du nouvel article L. 442-1 du Code de commerce", RDC 2019, n° 116j0, p. 48 - Voir également Cyril Grimaldi :"Comment interpréter la condition de « soumission » posée par l'article L. 442-6, I, 2° (devenu L. 442-1, I, 2°), du Code de commerce ?", à propos du Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 2 Septembre 2019, n°2017050625, statuant sur la notion de "soumission révélée notamment par l’existence d’un rapport de force économiquement déséquilibré entre les parties à propos de sociétés du Groupe Amazon...), RDC 2019, n° 116h6, p. 56


    DECRET n° 2019-1333 du 11 DECEMBRE 2019 REFORMANT LA PROCEDURE CIVILE

    La plupart des dispositions sont applicables pour les procédures introduites à compter du 1er janvier 2020.

    Parmi les modifications les plus importantes à noter :

    Panorama des principales réformes de la procédure civile à la suite de la publication du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile", Gaz. Pal. 7 janv. 2020, p. 13



    DOCTRINE




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